Notre réalité profonde : la Présence, la Conscience, l’Amour, le Bonheur
Ce sont des échanges amicaux autour du « moi séparé » et ma propre expérience qui m’inspirent ce dialogue imaginaire que je poursuis donc avec un certain enthousiasme (pour le troisième mois consécutif). Et c’est pour moi devenu habituel depuis longtemps de chérir des questions qui me viennent sans réponse immédiate, de les contempler, et c’est alors qu’une réponse surgit, en général plutôt rapidement, ce qui ne doit évidemment pas laisser entendre que j’ai réponse à tout, ni que les réponses sont complètes.
« INTERLOCUTEUR » – Indépendamment des hauts et des bas que je vis sur le plan émotionnel, je peux confier qu’il m’arrive de vivre aussi ce que j’aime appeler de vrais instants de grâce. Ils sont bien sûr exceptionnels et, bien sûr, j’aimerais qu’ils prolifèrent. Que pourrais-tu me dire à ce sujet ?
EXPÉRIENCE. – Nous vivons tous des instants de grâce, mais il peut nous manquer ce qui est utile, par exemple, à un photographe talentueux. On pourrait dire que l’art du photographe consiste à saisir des apparitions de grâce. Une seconde avant ou après la prise de la photo, cette dernière n’aurait pas été la même. En fait, l’art est permis, non pas par le vouloir, mais par une qualité de présence, l’inspiration et surtout la grâce. L’occasion photographique se présente exactement comme l’aide qui survient alors même que l’on ne l’attendait pas. Notre contribution consciente minimale peut être de rester disponible, de ne pas rester fermés, de ne pas maintenir une position mentale. Nous avons besoin, non pas de l’intention « accaparante » éventuelle du photographe, mais de sa disponibilité et de sa qualité de présence.
Un instant de grâce ne se fabrique pas, ni ne se demande. Il n’a rien à voir avec tous les petits ou même grands plaisirs que l’on peut parfois décider de s’accorder et qui sont davantage des soulagements. On fabrique ces derniers, peut-on dire, même si l’on n’en est pas toujours capable. En fait, contrairement à ce que l’on pourrait croire, l’intérêt que nous leur portons n’est pas toujours très vif. Inconsciemment, on languit d’autre chose, du vrai bonheur. Et c’est parce que nous avons connu le bonheur ou des instants de grâce que nous en languissons. Ils se produisent toujours de façon inattendue et parfois même insolite. En vérité, la grâce est toujours à l’œuvre en ce sens qu’il nous est donné de vivre rien d’autre que de quoi nous éclairer, nous libérer.
Le dernier instant de grâce (immédiatement réjouissant) que j’ai connu il y a quelques minutes m’inspire en partie ces mots et je ne sais même pas si je peux vraiment en rendre compte. J’étais déjà tranquillement assis devant mon clavier, peut-être en train de contempler une idée, et je me suis touché le nez sans raison apparente. Ce geste banal n’aurait autrement pas retenu mon attention, mais c’est la sensation, insolite, à la fois de mes doigts sur ma narine et de ma narine sous mes doigts qui a semblé causer une ouverture ou encore une sortie du monde mental. J’évoque ce petit épisode sublime, parce qu’il pourrait peut-être t’en rappeler d’autres. Des instants de grâce peuvent être vite oubliés, parce que l’on ne peut pas toujours les relier à une histoire.
Simultanément à cette sensation inhabituelle, j’ai été comme projeté à « l’endroit » du vrai bonheur, du plein épanouissement. Là, il n’y avait ni pensées, ni même quelqu’un pour penser ou ne pas penser. L’instant de grâce était là, libre, plein, sans quelqu’un pour le recevoir, ni même quelqu’un pour le donner. Le « moi séparé » ou le « mauvais photographe » s’est chargé de mettre fin à l’instant béni en voulant le saisir, s’en accaparer.
Un peu plus tard, l’idée m’est venue que la sensation de la narine sous mes doigts et que la sensation de mes doigts sur la narine, à savoir ce que les doigts sentent et ce que la narine sent, pouvaient symboliquement représenter l’unité, la non-séparation. Retiens surtout que le bonheur ne dépend de rien de ce que l’on croit habituellement, de rien d’extérieur à soi. (L’épisode « doigt/narine » est bien sûr totalement insignifiant, mais l’expérience lumineuse, exceptionnellement associée, explique son évocation.)
INT. – Je vis des moments où tout va bien dans ma vie sur les plans relationnel, corporel et matériel, sans échéances qui retiendraient mon attention, mais où j’ai cependant à composer avec une ambiance intérieure confuse, indéfinie, encombrante ou en tous cas plus ou moins déplaisante. Le rappel qu’il ne peut s’agir que du « moi séparé » ne semble pas dissiper le voile d’obscurité. Qu’est-ce qui pourrait m’aider dans ces moments-là ?
EXP. – Oui, bien sûr, il s’agit du « moi séparé », sinon de ses effets. Il ne sera pas vain, pour repérer mieux le « moi séparé », de regarder de plus près et très tranquillement cette « ambiance intérieure ». Elle pourrait être constituée, par exemple, d’une forme d’ennui, de manque, de menace, d’incertitude… Il pourrait alors être plus facile et utile de se dire : « Ah, c’est le « moi séparé morose, en manque, apeuré, méfiant, retenu, honteux ou coupable… ! » Et si c’est pour nous devenu évident que nous ne sommes pas cela, revenons à la conscience que nous sommes ce qui perçoit, ce qui est en paix, ce qui apprécie, ce qui aime… En envisageant les choses à partir de cette perspective, il ne se passera pas rien.
INT. – Sans forcément m’y laisser prendre, je dois souvent faire avec des pensées où, soit j’ai tendance à mettre en avant des preuves ou des explications, soit je vois défiler les mauvais traitements que j’ai subis. Même si je sais bien qu’il s’agit toujours du « moi séparé », c’est comme si je ne parvenais pas à le pointer aussi bien qu’en d’autres circonstances. Qu’est-ce qui pourrait m’aider ?
EXP. – D’abord, apprécie le seul fait d’être conscient de cela. Tu ne l’as sans doute pas toujours été ! Ensuite, renonce à tout effort ou ne compte pas sur des efforts pour arriver à tes fins ! Seul le « moi séparé » est concerné par des efforts. Ainsi, quand tu te surprends en train de penser de la sorte, tout en en étant encore plus conscient, permets-le, autorise-le ; ne lutte pas ! Tu pourrais découvrir que ce qui est permis, accueilli, s’agissant de ce qui est vain ou contreproductif, tend à perdre de l’intérêt ou du dynamisme.
Disons que les preuves et explications intempestives proviennent du « moi séparé défensif ou hyper-rationaliste », et que les mauvais traitements ressassés, sans doute éprouvés comme autant d’injustices, mettent en scène le « moi séparé plaintif, gémissant ». Vois-les en t’en amusant, en leur souriant. Ce sourire doit être empathique, non pas moqueur, ni condescendant. De toutes façons, en les observant comme tu le fais déjà, en manifestant donc davantage ce que tu es, la conscience, tu leur retires de leur pouvoir.
Par ailleurs, lorsque tu as donc à l’esprit un mauvais traitement que tu as subi, vérifie comment tu y réagis ou comment ça y réagit en toi. Si tu observes cela chaleureusement, tu as une réponse. Peut-être vois-tu la plainte, la révolte ou la résignation. Tu es alors en train de démasquer le « moi séparé plaintif, révolté ou résigné ». N’est-ce pas simple ? Et si tu débusques ensuite la douleur qui se cache immanquablement sous la réaction, tu déloges le « moi séparé souffrant », le « moi séparé apeuré, frustré, angoissé, coupable et/ou honteux ».
Non, ce n’est pas difficile de pointer le « moi séparé », ce qui pense, ce qui imagine et ce qui souffre comme ça le fait depuis toujours. Et sache ou rappelle-toi surtout que tu es ce qui perçois et reconnais le « moi séparé ». (Nisargadatta Maharaj a dit : « Quand vous aurez compris que rien de perceptible ou de concevable ne peut être vous, vous serez délivré de vos imaginations. Nous passons à côté du réel par manque d’attention et nous créons le non-réel par excès d’imagination. Voir chaque chose comme imagination née du désir est nécessaire à la réalisation de soi. » Il n’est pas toujours si difficile de réaliser que ce que nous déplorons, nous l’avons d’abord imaginé.
INT. – Quelle pourrait être la différence essentielle entre la mise en avant, pourrait-on dire, du « je conscience » et celle du « je séparé » ?
EXP. – Là encore, la réponse est dans la question : le « je séparé » dit la séparation, la rupture d’avec notre véritable nature. Il annonce en quelque sorte une localisation définie, délimitée, donc limitée, réduite. Il déplore ou revendique un isolement. Il attache une importance extrême à des objets, à ce qui peut être perçu (un corps, du penser, des émotions, à ce pour quoi il se prend.
Le « moi séparé » et le « je Conscience » sont bien sûr le « je séparé » et la Conscience sans auto-appropriation. Repérer mieux le « moi (je) séparé », c’est savoir de quoi il s’agit lorsque nous disons « je », lorsque nous impliquons « je ». Et c’est être moins dans l’ignorance. On peut réaliser qu’il ne s’agit pas du même « je » lorsque je dis, par exemple, « je suis malade, fiévreux, épuisé… », « je sais, je suis convaincu », « je suis contrarié (démotivé, déçu, en colère… », « je suis émerveillé, enthousiasmé, je me sens divinement bien… ».
Lorsque je dis « je suis malade », je me prends (probablement) pour mon corps physique. Lorsque je prétends savoir (mieux que quiconque), me vivant en fait comme celui qui a raison, je me prends (probablement) pour mon corps mental. Lorsque je dis « je suis contrarié, insatisfait… », je me prends (probablement) pour mon corps émotionnel. Lorsque je me montre dans l’appréciation, émerveillé ou enthousiaste, je manifeste (probablement) davantage ce que je suis en essence. Perçois ce vers quoi tendent les exemples et ne te laisse pas relativiser ce qui est suggéré à partir de nuances bien sûr envisageables.
INT. – Il me semble avoir bien compris ce qu’est le « moi séparé », pouvoir même le reconnaître à tout instant. Je peux même dire que j’ai globalement cessé de me prendre pour lui et que je sais être ce qui perçoit, non plus ce qui est perçu. Je perçois le « moi séparé » ! Je précise que je vois le « moi séparé » notamment à travers le conditionnement qui me confronte à des revécus répétitifs et à la chronicité de certains malaises. Je ne m’identifie plus à un conditionnement, au passé, à un vieux programme…
Or, quelque chose m’échappe assurément, parce que je ne vis pas ou vis peu les effets libérateurs de la conscientisation que tu évoques ici ou là. Quand je me sens plus ou moins mal, quand je me vois dans le « vouloir » ou dans la réaction, j’ai beau savoir ou me rappeler que le « moi séparé » est alors en scène, un certain malaise émotionnel persiste. Qu’est-ce que je ne vois pas ? Qu’est-ce qui me manque pour faire un pas de plus ?
EXP. – On peut toujours se demander et vérifier à quel degré on comprend les choses. S’est-on vraiment arrêté sur ce que l’on dit comprendre ? Quelqu’un peut dire nous comprendre, par exemple, ne rien remettre en question de ce que l’on a exposé, mais dès lors qu’il n’en tiendrait pas le moindre compte, on pourrait être en droit de se demander à quel niveau il nous a compris. Le verbe « comprendre » vient du latin « comprehendere, qui signifie « saisir ensemble, prendre avec, embrasser ». Ainsi, on pourrait dire que ce que l’on ne saisit pas, ce dont on ne tient pas compte, en réalité, on ne l’a pas compris.
Bref, savons-nous vraiment ce qu’est l’identification au « moi séparé » ou croyons-nous le savoir, le comprendre ? Lorsque le « moi séparé » s’impose, pouvons-nous le reconnaître au point de cesser de le suivre (au moins momentanément), donc d’en tenir grand compte ? Cela étant précisé, malgré une certaine compréhension incontestable, il se peut assurément qu’un effet manifestement libérateur tarde à se faire sentir. Alors, allons plus loin !
Il ne s’agit pas seulement de reconnaître « l’existence » du « moi séparé », mais il est essentiel de reconnaître surtout ce qu’il implique. S’il n’impliquait rien, en fait s’il n’était pas cause de la misère, de notre misère, il n’y aurait pas lieu de s’y arrêter. Oui, on peut dire que le « moi séparé » fait notre drame ou que notre mal de vivre est maintenu par le « moi séparé » qui domine. En fin de compte, reconnaître le « moi séparé », c’est surtout reconnaître les ravages qu’il fait.
Par sa seule désignation, le « moi séparé » n’annonce rien d’heureux. Or, le « moi séparé » est aussi séparateur. Lorsque tu te sens mal, dis-tu, tu sais être en scène le « moi séparé ». Ne t’arrête pas là, regarde comment ton malaise parle de séparation. Ce peut être à travers la manière dont tu l’éprouves. Tu te dis peut-être des choses qui parlent de séparation. Des pensées ou des impressions reconnues de séparation seront plus faciles à relâcher que directement le « moi séparé », mais cela reviendra au même, parce que ces pensées et impressions sont le « moi séparé ».
Avec un malaise émotionnel, même indéfini, ou avec des symptômes physiques plus ou moins éprouvants, il peut être assez facile de reconnaître que l’on se sent seul. On se sent seul de même dans des circonstances où l’on ne sait que faire, où l’on se sent d’abord impuissant ou démuni. Dans tous ces cas, on se retrouve donc avec la séparation. C’est là, par exemple, où le rappel que l’on n’est jamais seul produit souvent un effet libérateur immédiat.
Si tu éprouves que quelqu’un ou quelque chose te cause du tracas, cherche à te nuire, tu es dans la séparation. Tu peux aussi éprouver la séparation grâce à la honte ou à la culpabilité. La profonde honte t’incite à te cacher, à te séparer. La culpabilité pourrait te donner envie de te rapprocher, parce que tu te sens séparé. Si tu as peur, tu fuis, donc te sépares. Ainsi, vois comment ton « éprouvé » parle de séparation.
Et intéresse-toi aussi un moment à ce que tu veux, voudrais, à ce que tu aimerais, et demande-toi ce que l’obtenir t’apporterait. Quoi que tu répondes, vois que ça parle de séparation, de quoi défaire la séparation. D’autre part, tu pourrais ne pas avoir trop de mal à reconnaître combien tes pensées générales renvoient à la séparation d’une manière ou d’une autre. Il peut s’agir de temps à autre d’une séparation déplorée, d’une séparation ancienne ou actuelle, voire d’une séparation que tu préfères ou préférerais.
Je te propose donc maintenant de vérifier dans ce que tu ressens, dans ce que tu penses, dans ce que tu te dis, dans ce que tu dis et dans ce que tu fais, ce qui pourrait bien parler de séparation. Et si tu ne vois pas grand-chose, ce qui serait très étonnant, je te propose alors de vérifier de même, toujours dans ce que tu ressens, dans ce que tu penses, dans ce que tu te dis, dans ce que tu dis et dans ce que tu fais, en fait dans ta manière de vivre, ce qui pourrait bien parler de non-séparation. Sois curieux, intéressé, très attentif. Regarde !
Et si tu sais voir ce qui parle de séparation et de non-séparation dans ta manière de vivre, est-ce que tu en tiens vraiment compte ? Cela ne devrait-il pas te faire penser et agir différemment ? En ayant à l’esprit une citation fameuse d’Albert Einstein, on peut dire ici que nous ne pouvons pas nous attendre à des effets heureux, à des changements, si nous évoluons sans tenir compte de ce que nous disons savoir ou comprendre. Pour aller encore plus loin, si tu consens à considérer qu’il n’y a qu’une conscience, tu feras des expériences nouvelles et enrichissantes en envisageant les choses et les relations à partir de cette perspective.
Avec l’une ou l’autre de ces évocations, tu pourrais sentir quelque chose, sentir notamment un intérêt, te sentir comme éclairé, c’est-à-dire faire une expérience. C’est aller plus en profondeur, dépasser le seul concept du « moi séparé ». En réalité, c’est t’occuper utilement du « moi séparé » de façon pratique, concrète, efficace. Nous nous sentons séparés, même si nous ne le reconnaissons pas, parce que nous continuons de nous séparer, même si nous ne pouvons pas le reconnaître.
Bien sûr, il importe aussi ou surtout de revenir à la conscience que tu es toujours, qui demeure à jamais, quoi qu’il en soit, à savoir ce qui perçoit. Et comprends que tu n’es pas seulement ce qui perçoit ceci ou cela, s’agissant de ta propre histoire, mais que tu es la conscience qui perçoit toute chose, que tu es l’être, l’êtreté, le fait d’être, ce qui est commun à tout un chacun et à toute chose. Il y a être, il y a conscience, et c’est ce que nous sommes tous essentiellement. Donc, nous restons mal tant que nous ne percevons pas comment nous évoluons dans la séparation imaginaire et que nous ne vivons pas en tant que la réalité que nous sommes. Bien sûr, il s’agit de l’envisager par intérêt pur, par curiosité, par amour, peut-on dire, et non pas dans le contrôle, non pas dans l’effort, non pas avec du « il faut ».
À sa manière toujours pratique, très pédagogique, Francis Lucille nous explique que si nous vivons notre vie comme s’il n’y avait qu’une conscience, comme si la conscience était impersonnelle, universelle (pour reprendre ses mots), nous pouvons voir que « l’univers » nous apporte d’autres réponses ou expériences. N’attendons pas du mental qu’il nous donne la preuve de l’unicité de la conscience. Même y croire ne nous sert à rien. C’est seulement l’expérience qui peut nous éclairer. La réponse du Divin ou de la Conscience est toujours de nature heureuse.
Peut-être pourrais-tu te rappeler, alors que tu étais tranquille, détendu, bien plus présent qu’à l’ordinaire, des moments où tout semblait facile, où les choses se passaient avec une grande fluidité, où l’harmonie te touchait, t’émerveillait. Eh bien, cela se réalise, parce que la conscience n’est pas séparée et qu’elle est illimitée ! Et l’intensité de l’expérience était à chaque fois proportionnelle à ton niveau de présence, de disponibilité. Plus nous sommes ouverts, plus nous recevons, plus nous sommes heureux.
INT. – Ne pas se prendre pour ce que l’on n’est pas, donc pour un « moi séparé », et se savoir ce qui perçoit, donc la Conscience, qu’est-ce à dire en réalité ou pratiquement ? Dois-je me rappeler cela en permanence, tout faire pour ne pas être pris mentalement ? En fait, je me pose ces questions même lorsque je suis comme dans un état de grande tranquillité.
EXP. – Crois-tu, par exemple, que Jésus ou Bouddha se répétait « je suis conscient » ou « je suis la conscience ». Jésus nous a dit qu’il était la lumière comme il nous a dit que nous étions la lumière, mais il enseignait alors. Lorsque j’évoque ce que nous ne sommes pas pour en revenir à ce que nous sommes, je nous invite à réaliser que notre conditionnement séparateur ancestral cause notre mal de vivre et que nous pouvons nous libérer. Lorsque tu te sens tranquille, c’est simple, oublie tout ça !
Lorsque tu perçois sciemment quoi que ce soit, tu manifestes la conscience que tu es. Lorsque tu es en paix, tranquille, heureux en quelque sorte, c’est la même chose. Lorsque tu apprécies véritablement quoi que ce soit ou que tu es débordant de gratitude, tu es l’amour, donc la Conscience. Lorsque tu te sens précisément dans l’amour, ne cherche rien d’autre. Lorsque tu te sens comme entouré de beauté, que pourrais-tu vouloir de plus ? Lorsque tu es comme en état d’accueil ou plein de compréhension pour tout ce qui se présente à toi, tu manifestes la présence, la conscience…
Lorsque tu es souriant, naturellement souriant, ce à quoi tu peux même t’inviter généreusement, tu manifestes encore ta nature profonde. Tu ne maintiens pas longtemps ce sourire-là lorsque le « moi séparé » est en scène. Vérifie-le toi-même : en continuant de sourire, essaie d’avoir des pensées déplaisantes, celles qui te sont si familières. Cette seule expérience peut d’ailleurs te faire retrouver le sourire, parce que tu es alors dans l’observation.
Quant au penser inutile, dès lors que tu le perçois, que tu ne le revendiques pas, il a cessé d’être un problème. Lorsque tes pensées sont réellement heureuses, apprécie-le. Dès lors que tu perçois, que tu es en paix, que tu apprécies, que tu aimes, que tu vois la beauté, que tu accueilles, comprends, tu es sur le chemin qui ne peut que t’illuminer toujours davantage ou tu portes même témoignage de la conscience. La pleine reconnaissance est une caractéristique inhérente à la conscience, à la présence, quelle que soit son interprétation (gratitude, identification).
INT. – Pourquoi est-ce que je n’ai pas ce que je veux, d’une manière somme toute assez générale ? Pourquoi est-ce que je reste avec des attentes toujours insatisfaites ? J’ai envie d’ajouter que je ne me sens pas toujours dans l’attente, mais il reste qu’un même constat s’impose : il y a des expériences que je ne vis quasiment jamais et qui sont de celles qui m’ouvrent le cœur.
EXP. Rappelons d’abord que rien d’extérieur ne peut rendre quelqu’un heureux, ni lui ouvrir le cœur. Tu peux croire qu’une expérience t’ouvre le cœur, parce que tu ne te rends pas compte que ton cœur était ouvert avant de la vivre et que ton expérience heureuse était donc de la célébration pure. Rappelle-toi aussi ou surtout que ce qui déplore tout manque est le « moi séparé » et qu’il n’y a aucun moyen de le rendre heureux. Aussi illusoire soit-il, un « moi séparé » est fait pour être « séparé », donc malheureux. Si le vrai bonheur est dévoilé, le « moi séparé » disparaît. Et bien sûr, c’est le « moi séparé » qui relève des expériences qui ne sont pas vécues (en le déplorant d’une manière ou d’une autre).
En chérissant l’idée de réaliser ce que tu es vraiment, en t’y intéressant donc avec amour de plus en plus, en retrouvant sans cesse cet intérêt majeur, tu t’approches du bonheur qui exclut toute préoccupation quant à ce que tu vis ou ne vis pas extérieurement, alors même qu’il te met en situation de le célébrer aussi extérieurement. Quand nous aurons réalisé sans plus le moindre doute, non seulement que nous sommes ce qui perçoit, ce qui est conscient, mais encore que cela n’est pas limité à notre « petite personne », au « moi séparé », selon Francis Lucille, nous ne pourrons plus maintenir la moindre peur, honte ou culpabilité. N’y croyons pas, envisageons-le !
En attendant ou simultanément, nous ne perdons probablement pas notre temps à considérer de près le fonctionnement absurde du « moi séparé », c’est-à-dire notre fonctionnement aberrant ordinaire. Par exemple, nous restons en attente par rapport à des proches, alors que l’attente est la peur de l’adversité, des contrariétés, et que cette peur alors inconsciente est puissamment créatrice. Elle crée ce que nous redoutons. En outre, nous projetons sur ce et ceux qui nourrissent nos attentes une réalité dont ils sont dépourvus. De toutes façons, idéaliser une chose est déjà la rendre et même l’envisager comme inatteignable. (Inatteignable est d’ailleurs un synonyme possible de l’adjectif « idéal ».) Au passage, observons aussi que l’idéalisation est forcément de la séparation.
Non seulement nous attendons un « quelqu’un », non seulement nous l’idéalisons (l’inventons en le rendant inatteignable), mais nous superposons à notre « vouloir » la croyance que nous n’en sommes pas dignes, que nous n’y avons pas droit, que tout est impossible, etc. Tout cela est plutôt absurde, non ? Or, nous traitons nos élans du cœur de la même façon que nous vivons nos attentes, nos intérêts compensateurs. Vois à quoi peut être soumise notre disposition à être heureux, à réaliser notre vraie nature : « C’est impossible, je ne le mérite pas, ce n’est pas pour moi, je n’y ai pas droit… » Rappelons-nous que le « moi séparé » n’est pas concerné lorsqu’il s’agit du meilleur, du bonheur.
INT. – Francis Lucille nous propose d’envisager la vie comme si nous étions la conscience universelle, d’autant plus lorsque nous avons reconnu que nous n’avons pas la moindre preuve qu’il n’en serait pas ainsi, d’en faire l’expérience au moins pendant quelques mois. Il nous suggère donc de penser, de ressentir, de percevoir, d’interagir et d’agir comme si nous étions effectivement la conscience universelle, donc la conscience unique, illimitée, non séparée. La proposition me sourit, mais j’avoue que je ne vois pas comment me prêter à cette expérience de façon pratique. Qu’est-ce qui pourrait m’aider ?
EXP. – Se savoir la conscience universelle, donc la Présence, l’Amour, le Divin, c’est avoir répondu à la question « qui suis-je » ou « qu’est-ce que je suis », ce qui n’est pas des plus faciles pour la plupart d’entre nous. Il est beaucoup plus facile de conscientiser ce que nous ne sommes pas, que nous ne sommes pas un corps, un mental, une personnalité, une histoire, du passé, un conditionnement, que nous ne sommes donc pas le « moi séparé ». De la même façon, il est difficile d’imaginer la manière dont nous évoluerons en ayant réalisé notre vraie nature et la manière incongrue, conditionnée dont nous fonctionnons est plus immédiatement identifiable.
Nous pensons, ressentons, percevons, interagissons et agissons à partir de notre conditionnement qui se manifeste en général à travers une blessure très spécifique. Notre conditionnement dicte nos pensées et nos comportements. Si l’on s’y dispose sincèrement, on peut assez vite les reconnaître. Dans les cinq cas de figure ci-dessous, découvre celui qui parle le plus de ton vécu familier, sachant bien sûr que tu peux être impacté par plusieurs blessures. De plus, en t’observant de près, tu pourras préciser et ajuster ton propre fonctionnement, démasquer ton « moi séparé » envahissant.
• En général, l’abandonné pense qu’il est inutile et inintéressant ; il se sent seul et impuissant ; il est impressionné, intimidé par ce qu’il perçoit ; en s’oubliant, il donne tout aux autres ; en agissant en sa faveur, il se culpabilise.
• En général, le dévalorisé pense qu’il est nul, sans valeur ; il se sent envieux et frustré ; il est attaché aux apparences et les interprète ; il n’est pas enclin aux partages ; dispersé, ayant tendance à papillonner, il change sans cesse d’activité.
• En général, le maltraité pense qu’il est mauvais ; il se sent en manque et angoissé ; il juge tout ce qu’il voit ; seul compte pour lui l’attention qu’on lui accorde, ce qu’on peut lui donner ; surtout à la maison, il lui faut tout le temps être actif.
• En général, même s’il se fait passer pour le meilleur, le rejeté pense qu’il est idiot et méchant ; il se sent énervé, insatisfait ; il ne voit rien ; il veut contrôler tout le monde ; il prétend faire beaucoup et ne fait rien.
• En général, le trahi pense qu’il est dérangeant et non important ; il se sent privé et honteux ; il voit le bien où est le mal et le mal où est le bien ; il ne parvient pas à vivre le partage ; en solitaire, il peut être très actif et productif.
En te voyant positionné et fonctionner en tant que blessé (abandonné, dévalorisé, maltraité, rejeté et/ou trahi), donc en tant que « moi séparé », il va te devenir de plus en plus facile de reconnaître l’intérêt pour toi à délaisser tes vieux schémas, tes vieilles habitudes psychiques, à délaisser le passé. Et comme déjà proposé, rappelle-toi ces moments où tu as simultanément vécu la tranquillité et l’harmonie manifestée. Par ailleurs, tu peux aussi te demander, dans la situation du moment qui te préoccupe, comment pourrait bien la vivre une personne présente, sachant que ce qu’elle est et que tout un chacun est, c’est la Conscience Universelle.
Si ce questionnement est sincère, au début à partir d’une situation peu épineuse, il pourrait te venir que la première attitude ajustée consiste à cesser de te dire ce que tu dis et surtout d’y croire, à relâcher l’investissement mental (réactionnel, émotionnel), à commencer à te détendre psychiquement. À partir de cette sincérité et de cette nouvelle disposition, tu ne tarderas pas à en apprécier des effets heureux. Leur reconnaissance deviendra l’auto-invitation à maintenir ton nouveau choix d’évolution.
Les premiers effets heureux, plus ou moins immédiats, sont intérieurs, contraires à ce que tu éprouves ordinairement : le sentiment d’être en lien (non plus seul au monde), une sorte de satisfaction (non plus de la frustration), de l’amour (non plus de l’injustice), une grande paix ou tranquillité (non plus de l’énervement), un sentiment de liberté (non plus de la privation)… Tu peux ou pourras bientôt sentir aussi le plaisir, la gratitude, l’appréciation, la joie sans cause, un état sans attente… Et, « cerise sur le gâteau », tu verras se produire dehors des circonstances à l’opposé de celles que te faisait vivre ton propre conditionnement (ta blessure). Ultimement, lorsque nous relâchons notre conditionnement, donc le « moi séparé », nous cessons simplement de nous opposer au meilleur, à l’harmonie. (À suivre)
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