Nos positionnements psychiques (5/6)
À tout instant, quoi que nous fassions ou vivions, notre vieux conditionnement identificatoire nous laisse évoluer à partir de l’un ou l’autre de nos positionnements psychiques. Il s’agit d’une réalité si habituelle qu’à l’ordinaire, nous ne lui accordons pas la moindre attention, à notre seul détriment. Nous avons besoin, non pas de nous efforcer à changer quoi que ce soit en nous, mais juste à adopter la disposition qui précède les miracles, les transformations heureuses. C’est bien sûr dans toutes nos interactions relationnelles que nos divers positionnements pèsent le plus lourd.
Par exemple, quand ce que nous dit quelqu’un nous laisse mal, même si c’est bienveillant, c’est que l’un de nos positionnements psychiques est touché. Vous pourriez vous sentir mal en recevant de simples conseils, indéniablement pertinents et amicaux, s’agissant de votre style ou mode de vie (coiffure, vêtements, décoration…), par exemple si « ne pas s’occuper de soi » est l’un de vos positionnements. En revanche, vous pouvez continuer de vous sentir très bien en recevant des « critiques » et même des accusations délirantes si vous n’avez pas un positionnement psychique pour y faire écho.
Le positionnement psychique à identifier au plus vite pourrait être celui qui pourrait nous caractériser, qui s’active à tout instant, qui est le plus envahissant. Pour débusquer notre positionnement chronique et dominant, observons de très près notre état mental, réactionnel, quand il ne se passe encore rien ou pas grand-chose à l’extérieur, quand ce qui est déploré dans le moment n’a aucune réalité. Par exemple, avec le positionnement « savoir mieux que tout le monde », on ne demandera pas d’aide et si on la reçoit tout de même, on ne l’appréciera pas. Des positionnements psychiques dominants peuvent être : n’envisager jamais rien pour soi ; vivre des épreuves comme nécessitant un traitement à part ; éprouver le fait de n’avoir jamais de chance ; s’attendre à ce que les choses tournent mal…
Un grand nombre de nos positionnements contiennent l’allégation que les autres sont dans l’erreur et nous-mêmes dans le juste, qu’ils ont tort et nous raison. La plupart des positionnements de certains déclarent, à l’inverse, qu’ils sont fautifs, non méritants ou qu’ils doivent souffrir en silence. « Malgré tout ce qu’il me semble avoir libéré », me dit-on parfois, « je retrouve toujours le même état émotionnel envahissant ». Une réponse possible : « Ne serais-tu pas toujours avec le même positionnement ? »
Nous ne pouvons pas nous maintenir dans le même positionnement, dont nous pouvons ne même pas encore être conscients, et ne pas être confrontés aux mêmes épreuves. Tant que nous regarderons ce que nous projetons, nous ne verrons jamais autre chose, et plus nous ignorons qu’il s’agit en effet de notre projection, nous sommes assurés de vivre longtemps « Un jour sans fin ». Le maintien de nos positionnements psychiques nous assure en effet de faire nôtre le mythe de Sisyphe, de déplorer une existence absurde, « crucifiante » et indéfiniment répétitive. (Wikipédia) : « Le fait de « vivre le supplice de Sisyphe » signifie que l’on vit une situation absurde répétitive dont on ne voit jamais la fin ou l’aboutissement ».
Avec nos vieux positionnements maintenus, on peut dire que nous restons des « enfants blessés » (résignés, soumis, plaintifs, indignés et/ou « renonçants »). Donnons-nous le temps d’identifier ces positionnements-là, toujours préjudiciables, de les repérer, de les percevoir clairement, et des changements finiront par nous surprendre. Or, veillons à ne pas tenter de considérer nos positionnements psychiques à partir de l’un ou l’autre de ceux-ci : « vouloir comprendre », « vouloir en finir », « attendre des effets heureux », « n’y jeter qu’un coup d’œil rapide, sans s’y arrêter »…
« Se vivre comme à part, différent » est un positionnement psychique possible qui dira notamment « non, pour moi, ça n’est pas comme ça » et qui retardera surtout « l’éveil », la perception juste, la conscientisation libératrice. Pour certains, avoir profondément compris une chose, vécu un moment de grande compréhension, peut aboutir au positionnement « avoir tout compris », d’où la non-disposition au nouveau.
Si nous sommes effectivement concernés par ce qui se présente à notre conscience, par ce que nous vivons, nous ne sommes pas pour autant tenus de maintenir le positionnement « prendre ce qui arrive (ce qui m’arrive, à moi) », c’est-à-dire « se SENTIR concerné ». « Être concerné » peut être très puissant, puissamment efficace ; « se sentir concerné » peut être très éprouvant, causer beaucoup de souffrance. Le bon qui nous arrive est, non pas à prendre, mais à recevoir. L’éprouvant qui se présente à nous est d’autant moins à prendre. Tout gagne à être, non pas PRIS, mais ACCUEILLI.
On pourra comprendre que le positionnement ou le mode « même pas peur » ou « je suis au-delà de tout ça » n’est pas de nature à nous laisser en paix, dans un plein épanouissement. C’est le positionnement de quiconque nie, ignore sa réalité émotionnelle ou veut soigner son image. Quand, par exemple, le positionnement psychique « se venger » ou « ne rien laisser passer » n’est pas reconnu, avec pour intention d’avoir raison ou de régler un compte, la disposition au pardon n’est pas envisageable. Un non-pardon assure la pérennité d’un vieux positionnement et l’attachement à celui-ci rend le pardon impossible.
Nous sommes attachés à nos vieux positionnements, parce qu’ils soutiennent une intention qu’il n’est surtout pas question de remettre en cause. Avec l’intention de montrer l’injustice, la folie ou la cruauté du monde, on ne peut rester positionné que comme devant « dénoncer », « accuser », « condamner », s’indigner », « se montrer comme le meilleur »… Quand nous avons à l’esprit le conflit du moment, nous gagnerions beaucoup à mettre au jour les intentions qui sont les nôtres.
En effet, dès lors que nous sommes affectés, une intention au moins est activée : tout accepter ; vouloir retrouver ce qui a été perdu ; dénoncer l’injustice ; se mettre en colère ; prouver l’infamie… En même temps, quand nous sommes éprouvés, un positionnement au moins est adopté : ne pas demander d’aide ; ne tenir aucun compte de la réalité ; exiger des « réparations », se montrer plus malin ; ne pas s’arrêter sur le désagrément réel enduré… L’intention et le positionnement sont forcément très proches, parce que tout positionnement repose sur une intention (ferme et définitive).
Face à certains vécus, nous sommes toujours mal, parce que du douloureux est ravivé, mais encore parce que nos vieilles intentions sont contrariées, en fait alimentées. D’une manière générale, comment vivons-nous le fait d’abandonner une décision, une intention longtemps maintenue ? Cela nous est-il facile, évident, courant ? Toutes sortes de décisions à prendre se heurtent d’une manière ou d’une autre à certains de nos positionnements psychiques et prendre ces décisions n’est pas alors une sinécure.
Prendre une décision ne peut être difficile que si elle en contrarie une autre, déjà prise, et qu’il conviendrait de remettre en question. Comment allez-vous pouvoir décider en toute simplicité de faire appel à une aide extérieure, par exemple, quand vous avez déjà décidé – et depuis fort longtemps – que vous vous débrouillerez toujours tout seul ou décidé de montrer au monde votre supériorité. Avec votre décision (éventuelle) maintenue de vous contenter de ce que vous avez et surtout de le conserver, vous allez forcément retarder d’autres décisions qui vous animent pourtant, qui vous appellent.
Il n’est pas toujours évident d’intégrer nos changements d’état d’esprit. Il m’est arrivé de prolonger des activités dont je n’avais plus du tout envie, de mettre longtemps à le reconnaître. Une activité que nous poursuivons joyeusement reflète un état d’esprit, mais que se passe-t-il quand l’intérêt disparaît ? La réponse dépend de l’un ou l’autre de nos positionnements. Si l’un de vos positionnements est « aller au bout des choses », par exemple, assumer pleinement une perte (soudaine) d’intérêt ne se fera pas toujours de façon spontanée.
La poursuite d’une activité qui ne nous convient plus indique notamment le maintien d’un positionnement psychique contrariant : « ne pas rester seul », « profiter de ce qui est là », « ne surtout rien perdre », « ne décevoir personne », « ne pas se révéler »… Ce n’est pas toujours très simple de changer de travail, de logement, de fréquentations, d’activités diverses, mais peut-être est-ce aussi parce que changer d’état d’esprit est encore plus difficile, plus inhabituel, très loin de notre portée. Ne vous appesantissez pas trop sur votre difficulté à changer vos habitudes, découvrez plutôt quel positionnement psychique vous pourriez résister à abandonner !
À moins de nous sentir pleinement épanouis, nous n’avons aucune raison sage de tenir à notre état d’esprit général actuel, lequel englobe des positionnements psychiques qui nous empoisonnent la vie. En général, même sans être bousculés émotionnellement, nous pouvons toujours être disposés à préférer un autre état de conscience que celui qui nous limite encore. Si notre état d’esprit actuel nous convient vraiment, sans doute a-t-il déjà changé. En effet, nous avons pu avoir délaissé de vieux positionnements. Cette expérience montre la possibilité d’en délaisser bien d’autres de même… Alors, pourquoi ne pas nous y disposer tout de suite ? Comment pourrions-nous ne pas résister à la paix, à l’amour, au bon, si nous restons obstinément positionnés notamment en tant que honteux, coupable ou non-méritant ?
Le positionnement « subir » qui est le nôtre à un certain degré n’est pas de nature à nous laisser reconnaître et honorer nos propres élans. Un élan qui surgit et l’appréciation qu’il peut susciter sont incompatibles avec des positionnements psychiques. Ces derniers parlent de notre blessure principale, tels que « subir l’existence, être sans valeur, être indigent, contrôler les autres et les circonstances, se vivre comme étant un problème »… Le phénomène psychique relevé ici pourrait expliquer nos propres contradictions (qui nous étonnent peut-être). Par exemple, nous nous disons intéressés par une chose et prenons des « décisions » contraires…
Certains de nos positionnements semblent censés informer notre entourage de nos préférences, priorités et même mises en garde, toujours dans l’ignorance que cela nous dessert. Par exemple, le mode « on ne me le fait pas » ou « je ne suis pas du genre à me laisser emmerder » est en général très criard. C’est le positionnement « être le plus fort » ou « être vainqueur ». Autre exemple, des hommes efféminés et des femmes virilisées sont parfois une caricature des positionnements identificatoires, mais il en existe bien d’autres, aussi grossiers ou plus subtils… Amusons-nous à reconnaître nos propres positionnements et n’en jugeons aucun !
Tout comme le racisme et l’homophobie, par exemple, le machisme peut être un positionnement qui ne passe pas inaperçu. Il proclame « être un mâle, un vrai », ce qui est davantage, en réalité, « paraître viril ». Avoir à l’esprit le positionnement psychique qui saute aux yeux de l’un de nos proches peut être édifiant, non pas pour le juger, mais pour nous encourager à reconnaître les nôtres.
Une personne obèse qui déboule chez vous, avec chien et sacs encombrants, peut être la proie de son positionnement psychique « ne surtout pas passer inaperçu ». « Parler fort » ou « faire du bruit » est un positionnement dont l’intention est d’étouffer ce qui se passe autour de soi, à son avantage immédiat. Vous pourriez vous battre longtemps contre vos kilos en trop en faisant fi, par exemple et éventuellement, de votre positionnement « trouver sa place », « être remarqué » ou encore « se protéger, se montrer fort ».
Puisque cela finit par nous faire mal, de temps en temps, nous pourrions admettre que de rester positionnés comme nous le sommes est tout à fait insensé. Admettons-le alors sans le déplorer, juste pour nous comprendre ! Dès lors que la moindre contrariété surgit, nous pouvons tenter d’éclairer notre positionnement réactivé ou nous dire tranquillement : « Ah, je me retrouve là avec un positionnement psychique que je ne perçois pas encore ! » Nos divers positionnements parlent surtout, non pas de nos qualités d’âme, mais de la façon dont nous nous lésons, dont nous nous compliquons l’existence.
En général, au lieu de nous rendre compte de l’aberration de nos fonctionnements conditionnés et donc tout à fait compréhensibles, nous restons positionnés comme si nous étions pertinents, justifiés, sur la bonne voie. Même quand il nous arrive de nous culpabiliser, nous ne nous arrêtons pas sur nos divers positionnements, nous ne les remettons en question à aucun moment. La façon dont nous vivons (interprétons) le monde, l’existence, les autres sert principalement la justification de nos divers positionnements psychiques.
Notre sentiment de culpabilité est toujours irrationnel, l’éprouvant donc en vain, mais nos positionnements psychiques sont eux bien réels, aussi longtemps que nous y tenons ! Et tant que nous y tenons, nous ne pouvons pas percevoir les choses autrement que nous les percevons, ni cesser de les juger. Nous ne pouvons pas grand-chose, s’agissant de notre culpabilité, sinon la confier au Divin (rien ne serait plus efficace), mais quant à nos positionnements, nous avons tout pouvoir : les reconnaître, cesser de les « revendiquer », les accueillir, les relâcher…
Être en quête de mieux-être en restant positionnés comme nous le sommes, ce serait comme vouloir caresser l’être aimé (ou encore lire en Braille) avec des gants de boxe. Pour notre épanouissement, nous voulons des choses, en rejeter d’autres, alors qu’il ne requiert que le délestage de ce qui nous encombre, à commencer par nos positionnements psychiques qui nous piègent inexorablement. Ne cherchons pas à acquérir quoi que ce soit, à stocker du concret ou de l’abstrait, mais aspirons à nous délester de tous nos encombrements psychiques.
Quand nous ne pouvons pas même évoquer la paix et l’amour, nous sommes juste enfermés dans un positionnement incompatible, qui s’y oppose donc. Nos positionnements ordinaires sont objectivement délirants, mais il serait vain de les juger comme scandaleux, immoraux ou inadmissibles, et pire encore de les justifier. Si vous ne pouvez pas percevoir l’un de vos positionnements psychiques comme étant délirant, ce n’est pas pour ne pas vous juger, mais c’est surtout que vous le croyez encore bienfondé. D’autant plus parce que je sais délirants tous nos positionnements psychiques, je me félicite à chaque découverte de l’un d’eux et, parfois, j’ai même l’impression de m’alléger.
Dès lors que nous sommes disposés à relâcher un positionnement psychique, nous n’en avons pas fini pour autant, mais son impact s’est déjà considérablement réduit. Il est à savoir qu’il a toujours surgi « sans invitation » et qu’il conserve longtemps une certaine dynamique… Ce qui nous aide toutefois, c’est ne plus tenir à aucun de nos positionnements psychiques, à aucune de nos considérations mentales, à notre état d’esprit conditionné, et chérir l’idée de ne plus qu’être inspiration, créativité, spontanéité…
Nous restons à bonne distance de nos ressentis douloureux profonds, quand nous sommes enfermés dans l’un de nos positionnements chroniques, nous nous maintenons dans un état d’esprit misérable ou limitatif. Et c’est également ce qui se passe à chaque fois que nous sommes dans la réaction. Évoquez l’une de vos préoccupations prenantes, et vérifiez d’abord si cette évocation vous remet dans la réaction, puis le positionnement qu’elle vous refait endosser. Suivant l’intensité émotionnelle éventuellement impliquée, acceptez alors de vous rendre compte qu’en l’occurrence, quelque chose a encore à changer en vous-même. L’encombrement intérieur ultime s’appelle « profonde honte » ou « sentiment irrationnel de culpabilité ».
La réaction peut être perçue comme un positionnement et le positionnement comme une réaction, mais la réaction peut s’apaiser tandis que le positionnement psychique reste inchangé. Il nous arrive de nous en vouloir d’avoir réagi comme nous avons réagi, mais nous ne remettons « jamais » en question nos intentions obstinées, nos décisions contraires à notre épanouissement. Le positionnement psychique repose sur du vécu éprouvant nié, sur des croyances et sur une intention ferme et définitive. De même origine, la réaction n’offre aucune autre intention que celle de réagir.
On pourrait dire que le positionnement est une réaction à laquelle on a ajouté une intention très précise et fermement maintenue. Ce qui est proclamé lors de la crise réactionnelle ne vaut que pour le temps de sa durée, mais l’intention d’un positionnement psychique ne nous quitte jamais. S’il vous semble impossible d’identifier votre positionnement associé à une circonstance particulière, invitez-vous à juste demeurer dans l’observation. Ce qui ne permet pas l’observation, le cas échéant, c’est le positionnement actif de l’instant. Ainsi, à tout moment, suivre ou tenter de suivre la seule auto-invitation à demeurer dans l’observation peut être l’occasion de surprendre un positionnement chronique.
Voici notamment des questions qui pointent vers des positionnements : « D’où est-ce que je m’exprime ? » ; « À quoi est-ce que je m’attends ? » ; « Qu’est-ce que je me dis, me raconte ? » ; « Qu’elle est mon intention profonde ? » ; « Qu’est-ce qui reste fixe en moi ? »… Soyez davantage intéressé par les questions que par leurs réponses. Si vous ne pouvez pas vraiment apprécier les choses, ni donc être dans la gratitude, en tentant d’y rester un petit moment, vous rencontrerez votre positionnement psychique en cause. Quoi d’autre pourrait ici et maintenant nous empêcher d’être en paix et dans l’amour, sinon un positionnement adverse ?
Tout positionnement psychique est un « habit », souvent une carapace, une prison parfois dorée, et cristallise donc l’impression fausse de séparation. Si vous attribuez à votre positionnement quelque bénéfice ou aspect heureux, vous en faites une « prison dorée », laquelle reste une prison, une illusion terrible. Les positionnements psychiques « rester à l’écart », « ne déranger personne », « s’autoriser tout et n’importe quoi », par exemple, peuvent épisodiquement laisser l’impression que tout va bien dans sa vie. La réalité est toute autre ! « S’autoriser tout et n’importe quoi » peut sembler cool à certains égards, mais on n’en reconnaît généralement pas les effets fâcheux, tout en les éprouvant très amèrement. Faire les liens entre les choses requiert une attention ou plutôt une disposition qui nous fait défaut en général.
Nous avons tous des intérêts compensateurs, mais le « faire ça ou prendre ça à la place » est un positionnement spécifique de certaines personnes. Le positionnement spécifique « se permettre quand même ça, pouvoir au moins se permettre ça » renvoie à la tendance (conditionnée) à se contenter de miettes. Ah, et apparemment, on peut vivre certaines miettes comme des joyaux !
La transparence de nos positionnements psychiques s’explique notamment par le fait qu’ils soient très personnels, intentionnels, et à l’inverse de nos réactions, que nous ne pouvons imputer à personne d’autre qu’à nous-mêmes. On peut croire (à tort) que les gens nous font réagir comme on réagit, mais on ne pourrait pas croire que les gens en face de nous causent nos vieux positionnements intentionnels, nos décisions irrévocables. Si nous pensons être positionnés comme nous le sommes à cause de nos « antagonistes », nous considérons, non pas notre positionnement, mais notre réaction, en étant dans le fourvoiement quoi qu’il en soit. Plus nous pouvons observer nos pensées courantes, plus nous réalisons que la cause se trouve en « nous », qu’elle reste notre vieux conditionnement.
Ce n’est pas par hasard, originellement, que nous nous sommes positionnés comme nous l’avons fait, mais personne ne pourrait aujourd’hui nous inculquer nos propres intentions. Personne ne vous a jamais influencé à l’encontre d’un tiers, par exemple, mais votre positionnement éventuel « écouter les racontars » vous a fait rencontrer les « bonnes personnes ».
Nous pouvons nous laisser embarquer dans des discussions qui n’en finissent pas, parce que nous ne nous rendons pas compte que ce qui tente de communiquer, ce sont deux positionnements psychiques opposés. Bien des échanges pourraient être enrichis si les positionnements de chacun pouvaient être reconnus, posés, pris en compte… Étant déjà enlisés dans nos propres positionnements contradictoires, donc pénalisés, nous sommes attirés, relationnellement, de façon saisissante, par ceux dont le positionnement psychique dominant est incompatible avec le nôtre. Compte tenu des intentions qu’ils véhiculent, nos positionnements psychiques nécessitent des contextes appropriés, toujours de nature conflictuelle, et nous ne sommes pas en peine pour les mettre ou les maintenir en place.
Dès lors que nous tentons d’établir des liens, forcément à partir de notre conditionnement, nous ne pouvons les uns les autres qu’être tôt ou tard confrontés à des relations chaotiques. Seules les relations qui s’installent de façon naturelle, non chargées du vouloir et des attentes, prédisposent aux vrais partages. Dans ce monde, nous pouvons largement trouver de quoi célébrer notre plénitude, dès lors que nous avons pu la dévoiler, mais ce monde ne peut et ne pourra jamais la faire naître en nous.
Adopté par inconscience, le positionnement « je suis de ce monde », communément partagé, pourrait être l’un des plus difficiles à reconnaître, et il a causé tous les autres. Qui SE SAIT ne pas être de ce monde ne manifestera pas en pleine conscience un positionnement psychique ou ne le revendiquera pas. Tout positionnement psychique vise le monde de la forme, de façon exclusive et illusoire, et c’est un conflit, non pas à résoudre, mais à abandonner, notamment en percevant son absurdité. Pour pouvoir décrédibiliser nos positionnements psychiques, encore faut-il les avoir reconnus, ce qui est loin d’être évident puisqu’ils nous sont collés à la peau, à l’âme, à notre fausse identité.
Il serait dommage que vous revendiquiez vos positionnements psychiques face aux autres, d’une manière ou d’une autre, car cela exclut la possibilité de vous y trouver en tant que vous-même. « Ah, tu veux rester positionné comme tu l’es ! Je te comprends. Simplement, j’aime l’idée de te rencontrer sans ton habit psychique, sans ta cuirasse. » Personne ne viendrait à nous en pleine conscience pour tenter de sympathiser ou de communiquer avec un positionnement psychique ! Nous ne pouvons pas être à la fois nous-mêmes et avec un positionnement mental. Certes, c’est ordinairement l’ego qui tente d’interagir avec le monde !
Plus j’explore le phénomène des positionnements psychiques, plus je vois qu’ils font et maintiennent tout notre conditionnement, et plus j’ai à cœur de les débusquer « tous ». Sans nos positionnements psychiques, avec nos intentions fermes et définitives, il ne resterait pas grand-chose de notre vieux conditionnement. Et être conditionné veut dire être dépendant. Nous sommes bien sûr complètement dépendants de nos positionnements psychiques, ce qui est terrible en ce sens que nous ignorons à la fois la dépendance et ce à quoi nous sommes dépendants.
Si nous profitons des petits inconforts qui nous traversent pour identifier le positionnement actif, ce qui nous permet de nous en défaire peu à peu, nous nous épargnerons les bousculades émotionnelles plus violentes. N’attendons pas d’être pris par une grosse réaction pour débusquer le positionnement impliqué car ce sera alors impossible s’il n’a jamais été vu, repéré, reconnu antérieurement. Quand on a déjà reconnu l’un de nos positionnements psychiques familiers, c’est un peu comme s’il avait perdu la capacité d’envahir tout l’espace, ce qu’il fait à l’ordinaire.
Quand il est actif, rappelé, un positionnement psychique occupe tout l’espace intérieur et il nous aveugle complètement. Quand nous allons délibérément affronter une circonstance à partir d’un positionnement psychique activé, la circonstance pourrait avoir changé, nous ne le verrons pas et nous pourrons alors la ruiner. Le positionnement « on va voir ce qu’on va voir » fait généralement fi de ce qui est dans l’instant et, en effet, ce que l’on voit n’est pas joli !
Si nous sommes positionnés de sorte à considérer que l’amour sans cause n’existe pas, ni bien d’autres réalités, cela n’existe pas pour nous, hélas ! Si nous sommes positionnés en tant qu’infortuné, de sorte à considérer que nous n’avons jamais de chance, nous nous donnerons à vivre de quoi le confirmer sans cesse. Si l’un de nos positionnements psychiques est par exemple « les choses sont ce qu’elles sont », nous ne nous disposons pas à en vivre d’autres. « En fait, là dans l’instant, je suis positionné comme si …, avec l’intention de …. Eh bien, puisque je le vois désormais, rien ne m’oblige de maintenir le tout ! »
Quand nous nous disposons cordialement à relâcher un positionnement psychique, pour l’avoir surpris, nous découvrons ce qu’il raconte, ce qui l’a mis en place. Nous sommes positionnés comme nous le sommes, parce que nous avons adopté une intention « ferme et définitive ». Or, nous faisons corps avec celle-ci et elle ne peut donc pas être aisément identifiée. Identifier nos positionnements psychiques, ainsi donc que nos intentions, revient à reconnaître ce que nous ne sommes pas. Pour beaucoup, la chose est inenvisageable.
Il est plus facile de relâcher un positionnement psychique, reconnu comme étant général, que de le relâcher à partir d’une circonstance éprouvante qui l’incrimine. Quand vous venez d’apprendre un diagnostic médical « terrible » ou que votre partenaire vous a « trompé », allez droit aux douleurs présentes, comme vous le pouvez, et le temps viendra vite pour considérer aussi vos positionnements malencontreux, par exemple « subir l’existence », « mériter l’adversité », « ne pas avoir droit au meilleur »… Mais qui est donc ce personnage qui se positionne comme il le fait, qui défend quelque intention ? Bien évidemment, c’est l’ego, le « moi pensant », le « moi souffrant », un personnage historique, un vieux programme, un conditionnement en scène !
Nous pouvons nous positionner de façon heureuse, ce qui nous arrive bien entendu, mais quand nous reconnaissons un positionnement psychique, invalidant, il requiert, non pas une substitution, mais juste un abandon. Quand nous sentons que nous délaissons un positionnement, pour l’avoir reconnu, nous pouvons ressentir une grande légèreté et parfois même le « meilleur prêt à jaillir ». Si nous ne nous sentons pas touchés (positivement) en considérant l’un de nos positionnements psychiques, en fait, c’est juste que nous ne l’avons pas clairement identifié ou que nous le revendiquons encore. Nous pouvons nous rendre compte de cela, sinon l’envisager, sans « le soumettre à un positionnement », sans en faire un problème. Tout est bien ! (À suivre).
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