La réconciliation avec soi-même
Avez-vous lu la dernière chronique ? Avez-vous testé la proposition qui en constituait l’essentiel ? À partir de toute circonstance qui provoque un malaise émotionnel et qui s’impose de façon répétitive dans votre vie actuelle, je vous invitais à retrouver en quelque sorte le petit enfant que vous avez été et qui a incontestablement éprouvé la douleur concernée (ce même malaise qui ne cesse aujourd’hui d’empoisonner votre existence). Pour vous approprier plus sûrement ce qui est énoncé là (si vous le voulez), relisez ou lisez ce texte (chronique n° 77). En définitive, je vous engage tout bonnement à plus de considération pour vous-même. Que les paragraphes qui suivent vous permettent de recevoir ce même message plus pleinement !
Dans la chronique susmentionnée, je mets volontairement l’accent sur l’aspect nettement malencontreux de nos conditions de vie, ce pour quoi nous nous escrimons tant à trouver des solutions, mais vous pourriez découvrir que le défaut de considération qui est nôtre n’est pas réservé aux seuls problèmes. Nous allons y venir. Oui, les problèmes longtemps irrésolus résultent d’un manque de considération. En effet, face à certaines difficultés professionnelles, relationnelles ou autres, on s’évertue parfois à adopter divers comportements ou stratégies ; on se demande quoi faire encore, sans réaliser ce faisant que l’on fait fausse route. Le seul souci persistant du « quoi faire » révèle justement qu’un défaut de considération perdure.
Voyez ces personnes qui s’appliquent à être bien gentilles, toujours serviables, disponibles, tolérantes… (et à l’être toujours plus, plus, plus) tout en continuant de déplorer le peu de reconnaissance qui leur est manifestée. Des personnes s’épuisent au travail, sans gratification d’aucune sorte, et se font violence pour trouver moyen d’en faire encore davantage. D’aucuns se saignent perpétuellement aux quatre veines pour des partenaires ingrats et jamais contents. Les uns et les autres se demandent quoi faire de mieux. Ils ne savent pas (nous ne savons pas) que le comportement adopté – aussi généreux ou bien intentionné soit-il – n’est qu’un mouchoir sur une peine évitée ou de la saleté repoussée sous les meubles. Nous avons à diriger ailleurs notre attention.
En vue d’un résultat heureux, il n’y a jamais rien à faire au niveau où nous intervenons et avec des attentes que nous ne nous avouons même pas. L’expérience montre que nos efforts demeurent vains et, inconscients que nous sommes, nous continuons de les fournir assidûment. Il y a seulement du malaise perpétué sa vie durant et qui appartient à l’ex-enfant que nous sommes et qui, pour son conditionnement spécifique, n’a pas eu droit à l’attention qui l’aurait équilibré, stabilisé et nourri. Il doit et peut lui-même s’accorder maintenant cette attention. Entendez-vous l’affirmation, recevez-vous l’invitation ? Et si le souci du quoi faire vous anime particulièrement, retenez que, pour votre transformation, votre besoin est au contraire de renoncer à faire nombre de choses auxquelles vous vous astreignez et qui vous desservent au bout du compte.
L’élément guérisseur, transformateur se trouve dans la formulation « J’ai été cet enfant-là ». Comprenez cependant qu’elle doit traduire un constat, une prise de conscience, une sorte de découverte ou d’aveu à soi-même, et non pas l’expression d’une désolation, d’une plainte, d’un regret, d’un os à ronger, de la honte, de la culpabilité… Peut-être cela vous est-il déjà arrivé d’en vouloir à quelqu’un pendant des heures et des jours, jusqu’à ce que vous appreniez quelque chose que vous ne saviez pas et qui change tout. Là, vous avez pu dire ou sentir quelque chose comme : « Ah bon, je ne savais pas ça ! Ah, OK, je comprends mieux maintenant ! Ah, c’était donc ça ! Ouf, je préfère ça ! Oh, comme c’est intéressant !, etc. ». Vous tenez compte du nouvel élément, vous le considérez et tout change en effet sans passer par le souci du quoi faire.
« J’ai été cet enfant qui s’est senti … (abandonné, dévalorisé, maltraité, rejeté, trahi) ». Testez chaque mot et voyez si l’un vous parle. Peut-être est-ce un autre mot qui vous viendra. Ensuite, rappelez-vous de chercher à ressentir le « J’ai été cet enfant-là » en tant que constat, en tant que réalité que vous considérez soudainement, que vous prenez en compte. Et prolongez, étendez l’exercice avec d’autres éléments de votre réalité. Par exemple, passez en revue quelque handicap, point faible ou limitation que vous pourriez avoir.
Vous n’êtes pas tenu d’être un cordon bleu, le roi du bricolage, un rédacteur professionnel de courrier administratif, ni doué de capacités extraordinaires (physiques ou autres), ni encore moins de parler chinois. Si vous vivez très bien le fait de ne pas parler chinois, il se peut en revanche que vous apaisiez quelque chose en vous en considérant l’une ou l’autre de vos limitations, en l’admettant, en vous l’accordant, finalement en sachant qu’elle existe. Et cela devient : « Oui, je suis cette personne-là ! ». Quand vous aurez, une première fois, saisi l’effet avantageux sur vous d’une affirmation de cette nature, vous trouverez intérêt à tenir enfin grand compte de votre réalité dans tous les domaines.
Par ailleurs, qu’en est-il de vos prédispositions, de vos dons ou talents ? Il en est peut-être qui s’épanouissent déjà à travers vous, vécus comme une seconde nature, mais vous êtes aussi tout à fait capable de nier ou mésestimer certaines de vos aptitudes particulières. D’aucuns les ignorent et n’en profitent donc pas tandis que d’autres s’en prévalent, ce qui ne parle certainement pas d’un épanouissement. Je ne connais personne qui jouit véritablement d’un avantage dont il se targue. Bref, mieux que dédaigner ses capacités, mieux que s’en vanter, il y a les reconnaître, les considérer pour ainsi les incarner. Et là encore, vous pourriez affirmer : « Je suis une personne qui … » (qui fait bien la cuisine, qui est bourrée d’idées pratiques, qui est serviable, disponible, tolérante, qui chante, dessine bien, qui crée l’ambiance, qui dédramatise des situations, etc.).
Si vous considérez enfin cette réalité tout à fait avantageuse, alors qu’ordinairement vous vous en voulez d’une manière qui la dédaigne, comprenez que vous pourriez ainsi expérimenter un degré de guérison ou de transformation. Ne vous en privez pas ! Si vous hésitez, si vous manquez de motivation, admettez au moins qu’un peu plus de considération pour vous-même, pour votre réalité ne saurait vous nuire.
Pour contribuer à une prise en compte croissante, quand vous détenez un « J’ai été cet enfant-là » ou un « Je suis cette personne-là », évaluez l’affirmation comme suit : sur une échelle de zéro à dix, à quel degré considérez-vous désormais la chose concernée ? Zéro serait une absence totale de considération et dix la pleine considération. La pratique vous montrera que la formulation d’un constat inhérent à votre réalité fait une différence heureuse au niveau de votre humeur, de votre moral et ultimement de vos conditions de vie. Considérer un ressenti douloureux ou un trait avantageux, c’est se le réapproprier, se l’approprier. C’est rendre au passé la douleur et c’est rendre plus présent l’avantage ; c’est l’incarner. Dès lors, tout devient différent !
Pour aller plus loin encore, revenons sur une question posée plus avant : cela vous est-il arrivé de vous réconcilier véritablement avec un ami, un membre de votre famille… ? Vous aviez été en froid avec cette personne pendant un certain temps, puis vous avez retrouvez intacte votre amitié ou votre affection. Qu’est-ce qui vous a permis de basculer du froid éprouvé à la chaleur recouvrée, et donc de vous réconcilier avec cette personne ? (Je ne parle pas ici d’une réconciliation avec quelqu’un qui était en conflit avec vous sans que vous l’ayez été vous-même).
Je m’étais intéressé à cette situation pour tenter de montrer le sens particulier que je donne à la « considération » (au fait de considérer), au « constat », à la « prise en compte »… Maintenant, grâce à ce même exemple, notez davantage le possible effet heureux d’une « chose considérée » : la réconciliation. N’a-t-on pas à se réconcilier avec soi-même ? Qu’en pensez-vous ? Êtes-vous sûr de ne pas vous en vouloir, tout comme vous pouvez en vouloir à d’autres ? Il est fort probable que vous vous jugiez, vous critiquiez plus durement que vous ne jugez, critiquez autrui. Vous n’avez jamais remis en question nombre de choses fausses que vous croyez en ce qui vous concerne. Considérez cela et vous finirez par vous réconcilier avec vous-même.
Quand vous en voulez à quelqu’un, reconnaissez clairement, honnêtement que certaines de vos attentes demeurent insatisfaites (aide, présence, affection, approbation, encouragement, reconnaissance, partage, complicité, réciprocité, invitations, sollicitations…). Et là encore, considérez objectivement, sereinement qu’en réalité, vous n’avez pas attendu cette personne que vous blâmez aujourd’hui pour éprouver cette attente frustrée. « J’ai été cet enfant qui n’a pas été … (aidé, soutenu, reconnu, encouragé…) ». Il est aussi possible que vous ayez du mal à déterminer ce que vous attendez au juste, mais vous pourriez (le cas échéant) reconnaître que vous attendez bel et bien, que vous êtes dans l’attente.
Reconnaissez cela. Permettez cela. Vous allez pouvoir aller plus loin ! Imaginez simplement que votre attente est satisfaite, qu’il y a été répondu ici et maintenant. Autrement dit, invitez-vous à vous sentir satisfaits, vraiment comblés. Dites-moi que la proposition est stupide, si vous le pensez, mais reconnaissez au moins qu’il est tout à fait facile de la suivre, de la tester. À condition de le vouloir, de le décider, vous pouvez même vous sentir mieux sur-le-champ. Ne serait-ce que quelques secondes, testez-le ! « Me sentir mieux, un peu mieux dans l’instant, ce serait quoi ? »
Je veux en venir à la possibilité de faire l’expérience de délaisser un temps ce qui ne nous convient pas, ce qui nous frustre ou nous rend malheureux, pour mettre notre attention sur ce qui pourrait être notre préférence. Ayez à l’esprit ce que vous voulez (faire et/ou avoir). Ensuite, imaginez que vous faites ce que vous voulez, que vous avez ce qui vous tient à coeur, et reconnaissez surtout ce que vous ressentez, comment vous vous sentez alors, car, en réalité, c’est cela que vous voulez. On s’attire de quoi ressentir davantage ce qu’on ressent déjà : du problématique, du conflictuel quand on est suffisamment négatif et du bon quand on est confiant, en paix, content…
Maintenant, ne vous prenez pas la tête à tenter de savoir quelles activités ou quelles possessions vous permettront plus sûrement de vous sentir bien, de vous sentir comme vous voulez vous sentir. Comme nous l’enseigne Eckhart Tolle, il s’agit moins de savoir ce que nous voulons de la vie que de nous rendre simplement disponibles à ce que la vie veut de nous. Oui, la vie veut le meilleur pour nous : soyons disponibles, ouverts. Soyons d’accord et heureux !
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