La non-envie – la résistance
La matinée du premier novembre m’a amené à vivre une expérience relativement pénible qui, finalement, s’est révélée être d’un riche enseignement (comme toute expérience soumise au « regard qui transforme »). Associé à d’autres découvertes ou compréhensions, l’enseignement reçu fait à point nommé l’objet de la présente chronique. J’ajoute en passant, quand je ne sais a priori qu’évoquer dans cet espace, que je peux immanquablement compter sur la vie, laquelle répond au moindre de nos besoins – pour peu que des croyances contraires n’y fassent pas obstacle.
Depuis 15 mois, je roule en tandem de façon régulière (plus de 4000 kilomètres parcourus) grâce à Philippe Bonnard (président du vélo club local) qui s’est généreusement désigné comme mon « pilote attitré ». J’aime lui rendre hommage à chaque fois que je le peux ! Ici, laissons de côté les effets heureux de mon entraînement intensif pour relever simplement que la dernière sortie en groupe de 80 kilomètres m’a mis et laissé mal, épuisé pendant plusieurs heures. Je n’avais pourtant pas même éprouvé des difficultés familières, j’endurais – comment dire – la non-envie de façon quasi physique. Mon corps ne voulait pas rouler et il rechignait à se prêter aux efforts naturellement attendus (pourrais-je dire également).
De retour chez moi, une fois au calme et reposé, là où j’allais pouvoir m’adonner à une autre de mes activités choisies qui, celle-ci, ne requiert aucun effort physique, j’ai retrouvé identique et intacte la non-envie, accompagnée d’une sorte de peine ou même d’abattement. Et, après cela, il ne m’a fallu que quelques heures pour identifier le vécu et vivre un vrai lâcher-prise. Lâcher prise demande d’être conscient de ce qui pose problème (de ce qui se rejoue une fois de plus).
Lors de ces deux moments distincts, comme dans bien d’autres, « j’opposais une résistance », j’éprouvais (pour mieux dire) tout bonnement la résistance. Comment vous sentez-vous quand vous résistez à faire quelque chose (qu’il s’agisse ou non de quelque chose que vous aimez faire ordinairement) ? En faisant la moue, vous risquez bien d’éprouver ennui, morosité, lassitude, découragement, dégoût, répulsion, ras-le-bol, fatigue, épuisement… Admettez que c’est d’autant plus gênant si l’activité en cause implique des efforts soutenus.
C’est quand on éprouve la non-envie que la résistance devient plus aisée à identifier. « Je n’ai envie de rien » revient à dire « je résiste ». Et résister fait mal, fait se sentir mal, fait souffrir. Or, la résistance ne se trouve pas seulement dans la non-envie. Au moins à un certain degré, elle accompagne encore l’envie et le fait même d’accomplir des choses que l’on aime. Je vois des gens « se punir » quand ils se font plaisir, tentent de se faire plaisir, se culpabiliser quand ils s’occupent d’eux ou, pire encore, s’interdire carrément le meilleur. Il s’agit toujours de résistance.
Ou bien on se laisse complètement aller à ce qui est, à ce qui se présente, à ce qu’offre le moment présent…, ou bien on y résiste. Considérez les « il faut », « il ne faut pas », « il faudrait », « il ne faudrait pas », « je dois », « je ne dois pas », « je devrais »… qui conditionnent nombre de vos faits et gestes ou de vos retenues et vous aurez une meilleure idée de combien, en effet, vous résistez. « Plus ça résiste et plus ça persiste », dit-on. L’acceptation précède au contraire la transformation, heureuse. On a beau savoir cela, on continue de résister et donc de ne pas accepter.
Ainsi, la résistance opposée à ce qui nous est donné d’expérimenter n’engendre pas seulement le malaise du moment, malaise qui est parfois une grande souffrance, mais elle nous empêche directement de vivre ce que nous voulons. Elle nous empêche de faire, d’avoir, d’être tout ce à quoi nous aspirons au plus profond de notre coeur. Ne pas ou ne plus résister à une chose (une demande qui nous est faite, quelque chose à accomplir, par exemple) ne signifie pas s’y soumettre. C’est rappeler qu’accepter une chose ne concerne pas l’attitude manifestée, la décision à prendre, mais seulement l’état intérieur. Et dans un état intérieur d’acceptation, de lâcher-prise, de non-résistance, il devient bien plus facile de faire le meilleur choix pour soi-même, de s’ajuster à la circonstance du moment, de s’épanouir véritablement. Ne plus résister, renoncer à la résistance, c’est retirer un obstacle, une entrave. C’est devenir libre !
Bien sûr, on ne résiste pas sans raison. Bien sûr, la tendance humaine à résister s’explique même facilement. En gros, on résiste, parce qu’on a peur. Mais cela nous importe-t-il de savoir pourquoi l’on résiste ou devrait-on encore se féliciter d’avoir une bonne raison de résister quand on a réalisé que résister produit l’inverse de ce qu’on dit vouloir ? Il est possible de se voir, de se sentir dans la résistance et de relâcher cette dernière. L’expérience heureuse à ne plus résister encourage à se faire de l’acceptation une règle de vie. Donnons-nous le temps pour l’adopter. Notez que relâcher un moment de résistance revient à achever graduellement une vieille histoire, à guérir une vieille blessure.
Alors, quand est-ce que l’on résiste ? Il y a évidemment résistance quand on s’impatiente, quand on a perdu l’enthousiasme, quand on réprime ses envies, quand on néglige ses priorités, quand on fait les choses en traînant les pieds, quand on y va à reculons, quand on renâcle, quand on retient une demande ou dans sa façon de la formuler, quand on remet les choses à plus tard, quand on exprime des « bof », des « pas envie », « veux pas », des « pas question », des « je sais pas », des « non », quand on se laisse faire, se résigne, se soumet, quand on ne se donne pas le droit, quand on adopte toute attitude réactionnelle. La plupart des jugements sont des témoignages de résistance. Précisons que la résistance n’est pas dans un seul non exprimé, par exemple, mais dans la réaction émotionnelle qui l’accompagne.
Résister, c’est vouloir se mettre en retrait, créer la séparation, le conflit. Et, à l’inverse, l’on peut se voir, se découvrir dans la non-résistance en exprimant – certes en les ressentant effectivement – des « OK », des « ça marche », des « allons-y », des « oui », des « eh bien non » (tout tranquilles)… On pourrait dire que c’est le plein accueil de son propre choix face à ce qui se présente (quel que soit ce choix). Là, on est en paix. Là, on est libre. On est serein et parfois joyeux. On est surtout unifié au moment présent, on est « avec », on est présent. On suit le flot de la vie, l’élan de son coeur. Si vous vous découvrez un vrai et profond sentiment de gratitude pour ce que vous avez, faites et êtes, vous êtes également sans résistance.
Avec cette gratitude au coeur ou dans le seul fait d’aimer l’instant présent (rempli de ce que vous avez, faites ou êtes), si vous vous détendez plus encore, si vous ressentez en conscience votre détente, vous savez que toute résistance est absente. Reconnaissez le flot de la vie. Accueillez le flot de la vie. Détendez-vous dans le flot de la vie. Soyez le flot de la vie.
En total accord avec ce que vous dîtes et ce que me fait vivre actuellement mon partenaire qui a peur de “revivre” un amour, une passion synonyme pour lui de “souffrances”…
Bien d’autres aspects également ou à plusieurs reprises je me suis investie et battue contre vents et marées pour finir par tout perdre mais trouver ma vraie place, mon chemin, encore mal assuré mais …