La conscience manifestée ou la manifestation d’un changement d’état de conscience
Quand ça ne va pas, quand quelque chose ne va pas, quand nous nous sentons plus ou moins mal, on peut ou pourrait dire simplement que nous « souffrons » – bien que cette expression soit limitée ou révélatrice. Ordinairement, on n’emploiera pas ce mot, d’abord parce que nous ne sommes pas du tout habitués à exprimer directement ce que nous ressentons. Quand ça ne va pas, on subit l’expérience et l’on y réagit d’une manière ou d’une autre. La subir fait déjà partie de la réaction, si on l’éprouve ainsi, ou le « subissement » est un support de la réaction. Et la réaction ne se prête pas à la possibilité de nommer les choses, de nommer ce qui est vécu. Réagir est une chose, dire vraiment ce qui est en est une autre ! La réaction n’a pas vocation à confier ce qui est véritablement ressenti, ni même à envisager une solution.
Rappelez-vous l’une de ces dernières fois où vous vous sentiez vraiment mal. Observez que ce qui vous vient tout de suite, en principe, c’est une situation, une histoire, avec beaucoup de détails. Vous avez donc les détails, des « faits », et vous avez probablement votre réaction. Elle est là, mais vous ne la nommez pas. S’il advient qu’on la nomme pour vous, qu’on vous la suggère, vous risquez d’abord et parfois pendant longtemps de passer au-dessus, de ne pas l’entendre, de ne surtout pas vous y arrêter, voire d’en être très agacé…
En fait, quand vous vous sentez mal, vous êtes ordinairement dans la réaction ; vous êtes tout bonnement en train de réagir : de vous résigner, de vous soumettre, de vous lamenter, de vous indigner ou de vous apitoyer sur votre sort (selon votre blessure). C’est dire que là où vous ne confieriez pas « je souffre », d’autant moins « je me sens mal », vous pourriez très bien déclarer, à juste titre : « Je suis en pleine réaction ». Dès lors que l’on a pu reconnaître que l’on était dans la réaction, on peut plus utilement s’intéresser à ses ressentis (douloureux).
En effet, quand on se sent vraiment mal, on est d’ordinaire en pleine réaction, mais si nous ne pouvons pas l’admettre, nous ne pouvons pas davantage reconnaître l’état réactionnel qui est toujours le nôtre tandis qu’il se fait plus discret, plus subtil. L’une de mes réactions grossières est ce que j’aime appeler le « rongement d’os ». Je m’empare d’une occasion problématique et je la rumine, je la ressasse, la mâchouille dans tous les sens. Or, d’autant plus désormais, l’os peut être tout petit ou « ma faim ne pas être vorace », mais cela ne m’empêche pas de reconnaître une posture ou une ambiance intérieure qui demeure bien familière, qui témoigne de la réaction. Et toute personne est pareillement concernée (relativement à sa propre blessure) :
« Elle m’a l’air bien malheureuse et désemparée ». Sûrement, mais elle est surtout résignée et n’envisage pour elle rien de bon ! (Abandon)
« Elle est toujours insatisfaite ». En effet, mais elle reste (inconsciemment) soumise à l’idée que le meilleur lui est interdit ! (Dévalorisation)
Elle est accablée, la pauvre ». Aujourd’hui, pas si sûr, mais elle ne sait pas faire autrement que se plaindre ! (Maltraitance)
« Elle en a des problèmes ! » Pas vraiment, il lui faut pester contre tout et n’importe quoi, le dénoncer, et elle trouve de quoi faire ! (Rejet)
« Elle a l’air contrariée, je ne sais pas comment l’aider ». Elle ne veut pas de ton aide, elle veut juste ruminer et grommeler. (Trahison)
Imaginez que nous abordions toujours les difficultés matérielles que nous pouvons rencontrer à la façon dont nous vivons nos états d’âme, nos réactivations émotionnelles. Peut-être est-ce d’ailleurs ce que font certains ou ce que nous avons fait longtemps. Au lieu de dire, d’expliquer tranquillement ce qui ne marche pas avec notre ordinateur, notre voiture, notre chauffage, etc., nous affichons notre découragement ou nous dénonçons « l’injustice, l’insupportable, l’ignominie… » Et plus nous restons dans l’énervement, dans la réaction, moins nos interlocuteurs sont en mesure de nous aider. Il faut dire que nous avons souvent à faire à de « bonnes pâtes » qui finissent par deviner ce qu’est le problème et qui ne nous envoient pas balader ! Les méritons-nous toujours ? Remercions-les !
Par ailleurs, il est vrai aussi que nous sommes tellement habitués – en fait conditionnés – à fonctionner comme nous fonctionnons, depuis toujours, que nous pouvons nous laisser croire que, d’une manière générale, tout va bien, tout va pour le mieux. Au pire, nous déclarerons que le seul problème sont les autres, ce qui se passe dans le monde, sûrs que nous ne sommes en rien concernés, ignorant en premier lieu notre interprétation. Nous méconnaissons notre tendance à interpréter l’existence et plus encore notre capacité à nous attirer ce que nous pourrions déplorer et, sans nul doute, ce que nous déplorons d’une manière ou d’une autre.
Parmi les lecteurs de ce qui précède, je le sais, rares, très rares seront ceux qui pourront y trouver une pertinence, un renvoi à leur propre réalité. Nous pourrions d’autant moins les blâmer que nous avons longtemps été des leurs. Mieux encore, nous sommes toujours des leurs à un certain niveau. Je rencontre des gens qui peuvent parler à satiété d’éveil, de spiritualité, de pleine conscience, de non-dualité, de transcendance ou autres, parfois sur un ton très étrange, et il apparaît vite qu’ils restent pris dans des limites causées par leur conditionnement. L’ignorance, la fuite ou l’évitement favorise l’illusion et la persistance de celle-ci.
Il y a bien des manières de ne jamais se confronter sciemment à son conditionnement et l’investissement spirituel peut faire l’affaire pendant un temps plus ou moins long, pendant des années, voire des décennies. Le spiritualiste aveugle (inconscient) fait fi de nombre de ses impressions, de ses ressentis profonds, comme si les honorer, les reconnaître signifiait y être attaché ou rester pris par le monde de la forme. C’est ainsi qu’il ne s’arrête pas non plus sur les effets dans son existence de son « ignorance », s’ingéniant à y voir le seul mouvement pur de la vie. Reconnaître quoi que ce soit veut précisément dire s’en détacher et non pas y rester identifié. Les hauts et les bas sont naturels et inévitables, mais nombre de nos conditions de vie restent juste imputables à ce à quoi nous continuons de résister…
Pour l’essentiel, retenons de ce qui a été évoqué jusque-là que nous sommes tous conditionnés, identifiés à notre conditionnement, et que juste le savoir pourrait être un « effet de la grâce », une bénédiction, une possibilité qui semble au moins très exceptionnelle. Et pouvoir soupçonner le conditionnement n’est de loin pas en connaître l’ampleur, toute la réalité. Autrement dit, nous avons tous en commun d’ignorer à quel point nous sommes conditionnés, à quel point nous ne sommes pas nous-mêmes. Je peux voir en maintes circonstances comment je ne suis pas moi-même, étant davantage moi-même quand je le vois. Or, pour peu que je me croie moi-même, je ne le suis plus !
Quand nous nous ouvrons à mieux, il y a deux difficultés majeures à cesser de fonctionner comme nous fonctionnons, d’être positionnés comme nous sommes positionnés, de penser comme nous pensons : nous avons toujours et exclusivement fonctionné ainsi, d’une part, et d’autre part, tout le monde autour de nous continue de fonctionner ainsi. Nous nous sommes adaptés, nous sommes devenus des adaptés. En réalité, ce faisant, nous restons de vrais inadaptés ! Nous sommes des êtres libres et nous restons positionnés comme si nous étions prisonniers ; nous sommes des êtres aimants et nous tenons à voir partout l’hostilité ; nous sommes des êtres joyeux et nous maintenons le sérieux, la gravité, la solennité.
Un préalable à la « découverte spirituelle », à l’ouverture spirituelle est, non pas une croyance (il ne s’agit surtout pas d’y croire), mais la reconnaissance en soi du « je sais » et le renoncement à ce dernier. On peut directement déclarer que l’on sait ou, si l’on s’observe un peu, se rendre compte que l’on est positionné la plupart du temps et en de nombreux domaines comme si l’on savait. Cela implique autant la réalité spirituelle que son potentiel, par exemple. Il devrait être assez facile d’admettre qu’un positionnement « je sais », trompeur, conscient ou inconscient, ne permet pas d’apprendre quoi que ce soit de nouveau dans le domaine concerné.
Tout bougon patenté que je fusse, j’ai réellement su très tôt qu’il y avait une autre réalité que celle que je connaissais et dont mon entourage semblait se contenter. Je ne savais pas que je le savais, mais mon positionnement général en témoignait : je voulais voir, je voulais comprendre, je cherchais, je questionnais, j’observais… En revanche, si j’avais partagé le « je sais » commun au plus grand nombre, j’aurais plus longtemps cultivé les mêmes illusions, j’en aurais eu bien davantage.
Pour réagir comme nous réagissons, vous, moi, tout le monde, il nous faut prétendre savoir ce qu’en l’occurrence, nous ne savons pas. Je ne parle pas ici des faits que nous utilisons pour réagir, mais de ce que nous en pensons, de ce que nous nous en disons, de ce que nous proclamons. Au besoin et si cela vous intéresse, vous pouvez faire un petit exercice facile pour tenter de vérifier pour vous ce qui est dit là. L’exercice (à vivre comme un jeu) pourrait être très édifiant, voire libérateur :
Prenez l’une de vos contrariétés et écrivez juste ce que vous en pensez, les jugements (déclarations) que vous pourriez faire, ce que vous vous dites à ce sujet. Faites des phrases courtes… Ensuite, pour chacune de vos assertions (jugements, accusations, autoaccusations…), posez-vous sincèrement la question suivante : « En suis-je sûr à 100% ? » Et ne vous laissez pas piéger par votre mental : « Il m’a volé, j’en suis sûr à 100% ! » Ça, c’est le fait, intéressez-vous à vos jugements, à vos conclusions !
Bien des faits dénoncés peuvent être avérés (même s’ils ne le sont pas dans beaucoup de cas), mais nous sommes blessés, non pas par ces faits, mais par ce que nous en pensons, par ce que nous nous disons. Par exemple, je ne peux pas douter du fait que ma première institutrice ne s’est pas une seule fois occupé de moi (utilement) en trois ans, non seulement parce que je l’ai vécu, mais parce qu’elle m’a dit et répété qu’elle ne s’occuperait jamais de moi. Or, qu’aurais-je pu écrire sur ma propre liste (cette circonstance étant déjà du revécu) ?
Je n’aurai jamais ma place dans ce monde.
Je suis un problème pour tout le monde.
Personne ne veut de moi.
Personne ne peut me défendre, ni ne le veut d’ailleurs.
Tout le monde me veut du mal.
Je resterai forcément illettré et je ne pourrai rien faire de ma vie (je publierai probablement un troisième livre en 2019 et il m’est arrivé de donner des consultations en anglais et en allemand).
Je vous fais grâce de mes autres mensonges personnels et vous propose d’admettre qu’à aucune de ces affirmations, j’aurais pu déclarer « j’en suis sûr à 100% ». Par bonheur, en l’occurrence, la vie m’a maintes fois montré mon égarement et si elle ne me l’a pas montré davantage, c’est juste qu’en « bon borné », j’ai continué de prétendre savoir des tas de choses et souvent de façon bien plus vindicative. Voyez pour vous ! Tout comme moi, vous pourriez découvrir que vous restez positionné, « sûr à 100%, comme si bien des circonstances étaient telles que vous les dites, telles que vous les jugez. C’est ce qui vous laisse mal (en vain) et/ou attire du mal.
Oui, plus haut, j’ai évoqué mon « je sais », un « je sais » vérifié, mais je ne suis pas dupe. D’abord, je n’étais pas « sciemment conscient » de savoir. Ensuite, j’ai fini par voir l’aspect exclusivement compensateur de ma quête de « vérité ». Tout finit par se révéler, par se faire jour ! Par ailleurs, s’il y a la posture bienvenue « je ne sais pas », le « je ne sais pas » conscient et intégré, il y a aussi tout ce que l’on ne sait pas sans savoir que l’on ne le sait pas. Percevez-vous la nuance ? Il y a la possible reconnaissance de son ignorance particulière et il y a la totale ignorance insoupçonnée de bien des choses. Dans mon exemple, je ne savais pas que je savais, quand je savais effectivement, mais je ne savais pas non plus que je ne savais pas, quand je ne savais pas (la plupart du temps).
Il se peut que ces propos fassent un peu l’effet d’un casse-tête chinois, mais « je sais » que vous les comprendrez si vous les lisez attentivement. En tous cas, quand on finit par « savoir sciemment » que l’on sait et/ou que l’on ne sait pas, ça change tout ; ça change la vie ! Mes deux dernières chroniques en sont en partie une illustration : jusqu’il y a peu, très peu, je ne savais pas que je pouvais faire certaines choses, voire des choses utiles, ni me libérer très aisément d’un petit ennui de santé chronique. En maintes circonstances, nous ne savons pas que nous pouvons et/ou que nous savons (savons faire par exemple). C’est vrai pour vous aussi !
Admettre tranquillement que l’on ne sait pas quand on ne sait pas, peu importe quoi, et tout autant admettre que l’on sait bien des choses sans le savoir, offre une vraie paix et un espace intérieur de grande liberté. Or, il y a en outre une chose absolument essentielle que l’on ne sait ordinairement pas, s’en privant en conséquence, et c’est la possibilité de « se libérer » ou de transformer radicalement son expérience intérieure chronique. Que l’on « subisse » son état de conscience forcément conditionné en le déplorant ou surtout sans même le remettre en question, on peut ou pourrait à tout instant basculer dans une qualité de vie intérieure insoupçonnée (non sue). Et pourtant, tout nous y invite !
Toute notre existence, toutes nos conditions de vie, toutes nos rencontres et lectures éventuelles, toutes contiennent une seule et même invitation qu’ordinairement et pendant longtemps, nous n’écoutons pas, nous n’entendons pas, nous ne saisissons pas. Surtout au début, l’invitation peut emprunter une voie – ou voix – douce. Ensuite, du fait de la « surdité », le chemin peut devenir plus scabreux, en fait très criard. Or, l’invitation peut aussi être très directe comme dans un texte tel que celui-ci. La difficulté commence avec la tentative de traduire (en mots) cette invitation et les mots dont nous n’allons pas nous priver ne peuvent pas faire mieux que l’évoquer, que la rappeler, que pointer vers ce qu’elle offre au bout du compte. Il est question d’une réalité qui est complètement étrangère aux considérations mentales de toute nature, à tout ce que nous pouvons PENSER.
Disons que l’existence ou la confrontation perpétuelle avec la « fausse réalité » nous dit : « Réveillez-vous ! Éveillez-vous ! Cessez de fonctionner en zombie ou de n’être fidèle qu’à votre conditionnement ancestral, à vos vieux schémas si limités, à votre seule dimension psychique ou psychologique ! Bien sûr, il y a vos vieux bobos et/ou diverses misères, mais ce que vous êtes n’en a jamais été troublé et vous l’êtes encore et encore, ici et maintenant, l’avez toujours été et le serez à jamais ! Vous ne pourriez jamais trouver un vécu, qu’il soit fantastique ou terriblement éprouvant, qui puisse en importance dépasser ou même égaler votre essence, votre « unique réalité », votre véritable nature, votre beauté, votre pureté, votre réalité lumineuse, votre « divinité »… Vous êtes cela »
Pour évoquer notre réalité, notre véritable nature, on nous parle souvent de paix et d’amour. C’est pertinent ou « justifié », mais aussi très délicat. Beaucoup d’entre nous ne peuvent pas entendre le mot « paix » sans se rappeler simultanément le mot « guerre » ou le mot « conflit », sinon rester (mentalement) avec ce qui s’y rattache. Quant à l’amour, réalité galvaudée, il fait outrageusement penser à la sexualité ou au mieux à une forme d’affection conditionnée, limitée ou réservée à quelques personnes et pendant un temps limité lui aussi. De la même façon, il suffit d’évoquer le divin pour susciter de la réaction, des haussements d’épaule ou simplement pour faire perdre l’attention de son interlocuteur.
La grande majorité des gens vivent l’existence en fonçant aveuglément et coûte que coûte, ne tenant aucun compte des scénarios répétitifs dans lesquels ils continuent de jouer les mêmes rôles éprouvants. Au mieux, ils tentent d’intervenir sur les effets du conditionnement, que ces effets soient déjà manifestés ou annoncés. Tous ne savent pas que les mêmes causes produisent les mêmes effets, dans le monde conditionné, ni que l’on ne peut extérieurement rien vivre de différent sans un changement d’état de conscience. Nous finirons toujours par éprouver ce que nous avons encore à éprouver, que nous soyons enfermés dans une grotte perdue dans la montagne ou que nous soyons au cœur de la cité. Nous avons essentiellement et même exclusivement – ai-je envie de préciser – besoin de changer notre état de conscience et non pas de nous soucier des effets actuels et à venir.
Ne confondons pas un élan qui peut être naturel, inspiré, pouvant même constitué une fonction, et qui consiste à prévenir de la réalité extérieure en souffrance, avec une option personnelle et réactionnelle qui ne serait encore qu’une tentative de fuir ou d’éviter ses vieilles peurs, ses vieilles douleurs. Il ne devrait pas être si difficile de faire la différence entre « suivre simplement son cœur » et « répondre à une forme de panique » ou « obéir à des croyances ». Si l’on fait une croyance de ce qui peut être une vérité, cette croyance aboutira toujours à une impasse. Toute l’histoire de l’humanité et même les actualités foisonnent d’exemples où les croyances (morales, religieuses, politiques…) n’ont abouti qu’à la cruauté et à l’anéantissement.
Dites-moi, juste ici et maintenant, êtes-vous conscient ? « Bien sûr », pourriez-vous me dire, mais percevez alors aussi que vous êtes conscient d’être conscient. Il s’agit ici du seul fait d’être conscient, d’être ce que l’on est quoi qu’il en soit, et non pas d’être conscient de ceci ou de cela. On peut être et l’on est conscient de ceci ou de cela, parce que l’on est d’abord conscient, parce que l’on est la conscience. Pouvez-vous reconnaître que cette réalité est vôtre, qu’elle n’est pas réservée à quelques initiés ? Et ici, « à quoi bon tout ça », pourriez-vous demander et même ajouter « la belle affaire ! »
Eh bien, plus nous MANIFESTONS la conscience que nous sommes, plus « se fait la lumière » et moins peut persister le doute ou le « à quoi bon ». « Manifestez la conscience que vous êtes ! Manifestons la conscience que nous sommes : manifestons ce que nous sommes, la conscience. » Et voilà la formulation momentanée qui vient de jaillir pour tenter de traduire l’invitation spirituelle ultime. Et suivre cette invitation exemplaire est certainement plus facile que ce que l’on pourrait peut-être imaginé. Ne vous demandez pas « comment faire », mais demandez-vous quand vous le faites. Sachez que vous le faites, reconnaissez que vous le faites et vous pourrez d’autant « le faire » de plus en plus.
Si vous « avez répondu » à la question « êtes-vous conscient », vous avez « manifesté la conscience ». Quand vous observez purement et simplement quoi que ce soit, sans rien en penser, vous manifestez la conscience. Si vous reconnaissez purement et simplement n’importe lequel de vos ressentis, l’une de vos réactions ou l’un de vos positionnements chroniques, vous manifestez la conscience. C’est d’ailleurs pourquoi c’est alors si efficace ! Quand vous vous retrouvez sans mots ni pensées, tout en demeurant « pleinement présent », magnifiquement attentif, vous manifestez la conscience. Quand vous suivez (en paroles ou en actions) un élan spontané, une inspiration (réelle), vous manifestez la conscience…
Et plus simplement ou peut-être plus ordinairement encore, quand vous sentez, quoi que ce soit, mais quand vous (le) sentez vraiment, quand vous sentez sciemment, vous manifestez la conscience. Sentir, c’est être conscient. À ce niveau, ce que vous sentez (colère, tristesse, injustice…) est sans importance car si vous SENTEZ effectivement le douloureux sans plus cette fois le penser, sans plus le « cérébraliser », vous êtes conscient, vous êtes conscience. Le regard transforme quand il est regard pur, quand il est conscience. Il en va de même pour l’écoute qui se justifie sans les « objets » entendus. Vous êtes conscience, vous êtes écoute, vous êtes regard, vous êtes ce qui sent. Vous pouvez le manifester sans parcimonie. Une qualité d’écoute (sans objet) précède toujours toute subtilité entendue, comme une intuition par exemple.
Je le répète au besoin, les mots sont limités pour parler de la réalité essentielle. Ils ne peuvent que l’évoquer et c’est aussi pourquoi ils rendent si faciles les débats futiles et les controverses incessantes. La formulation « conscience manifestée » peut d’un certain point de vue ne pas signifier grand-chose car tout est conscience ; tout est manifestation de la conscience. Il n’y a que conscience. Il sera peut-être utile à certains que l’on parle d’un état modifié de conscience et de la manifestation possible de celui-ci. Le plus clair de son temps, on manifeste un état conditionné de conscience, un état plus ou moins réactionnel, et l’on peut toutefois manifester un état de conscience qui dépasse le mental. Observez que le mental (le penser) n’est pas concerné dans les exemples donnés dans le paragraphe précédent.
Et voici une autre question invitante : « Dans l’instant, suis-je en train de manifester mon état de conscience ordinaire ou est-ce qu’il y a à travers moi la manifestation de la conscience pure ? » C’est tantôt l’un, tantôt l’autre, et c’est vrai pour chacun et chacune d’entre nous. Or, notre conditionnement est très puissant, mène la barque la plupart du temps et quand la conscience pure s’exprime, se manifeste, un phénomène ordinaire se produit. Le « divin » s’exprime en soi et le « petit moi », la personnalité s’en attribue la paternité : « C’est moi qui… ». On ne se rend pas compte que, ce faisant, on limite la manifestation inspirée.
Il s’agit seulement de laisser être ce qui est, ce qui vient, ce qui se présente, aussi bien en termes d’aptitudes, sans y surimposer en l’espèce une image de soi à consolider. Par exemple, il m’a été donné d’aider quelques personnes à reconnaître leur magnétisme exceptionnel. En dépit des explications données, certaines se sont dans la foulée déclarées guérisseuses. Elles se vantent de résultats qui ne sont rien à côté de ce que j’ai vu qu’elles pouvaient accomplir. Autrement dit, elles bloquent égoïquement leur potentiel. On ne peut pas à la fois être (en vain) préoccupé par son image de soi et laisser s’épanouir son potentiel.
En revanche, nous pouvons nous habituer à reconnaître nos postures mentales, notre tendance à penser quoi que ce soit de tout et de rien, connaître l’implication incessante du mental, et nous auto-inviter le plus souvent possible à juste être « présent », conscient de ce qui est, dans l’observation neutre de ce qui se passe à l’extérieur comme à l’intérieur. Ce que vous êtes quoi qu’il en soit, soyez-le sciemment et manifestez-le ! Toute votre expérience de l’existence s’en trouvera changée. C’est alors seulement que votre expérience de la joie, de la paix, de l’amour et de la liberté aura un goût dont aucun mot, aucune définition ne peut réellement témoigner… Et pour y parvenir, acceptons véritablement le chemin sur lequel nous mène la conscience et parcourons-le… en pleine conscience !
Tous, nous avons un besoin, un vrai besoin, un seul besoin qui soit essentiel, celui de réaliser ce que nous sommes et donc de cesser de nous prendre pour ce que nous ne sommes pas.
Quoi qu’il se présente, en termes d’actualités ou de perspectives annoncées, nous n’avons rien de mieux à faire que de reconnaître ce qui se joue en nous sur le plan émotionnel et qui est toujours un revécu.
Rien de ce que nous pouvons décider de faire et faire n’a le pouvoir de faire taire à jamais la peur qui se niche en nous, ni de nous en épargner les effets.
« N’ayez pas peur » proclamait le pape Jean-Paul II alors qu’il est plus sage de dire : « Reconnaissez vraiment votre peur et vous vous en libérerez ».
Il n’est rien que vous ayez à VOULOIR changer en vous car il change au besoin de lui-même quand, simplement, vous le reconnaissez, ne l’ignorez plus, ne le revendiquez plus.
Vous ne soupçonnez pas (moi non plus) toute la puissance inhérente à la pleine reconnaissance de ce qui est : elle guérit, transforme, libère, inspire, se propage et affecte le monde…
La plupart du temps et toujours en vain, nous ne faisons rien d’autre que nous occuper des effets endurés ou attendus de façon chimérique ou même relativement raisonnable.
Nous ne savons pas être simplement avec nos impressions multiples, avec nos vieux ressentis douloureux, sans les pervertir de notre penser conditionné.
Quand nous pouvons retirer le crédit accordé aux pensées qui ont trait au passé, à l’avenir ou qui sont jugement sur l’actualité, nous finissons par découvrir qu’ici et maintenant, tout va bien.
Dès lors que nous acceptons de reconnaître notre fonctionnement mental habituel, nous nous disposons à profiter pleinement et créativement de la conscience que nous sommes.
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