Le ressenti, plus qu’un outil précieux
Très souvent, on a pu éprouver bien des émotions, parfois violentes, mais on a surtout passé son temps à penser, à ne faire que penser. Même et surtout en étant mal émotionnellement, on a pensé encore, on a d’ailleurs contribué au flot incessant des pensées. On pense, on pense, on pense, mais on ne pense jamais à considérer ce seul phénomène. Il est puissant, il est envahissant, il est permanent. On pense du matin au soir, peut-être un peu moins quand on est absorbé dans une activité qui demande de l’attention. Quant aux moments « bénis » où l’on cesse de penser, on ne les repère pas, précisément, parce que l’on ne pense pas ! Et, bien sûr, on ne fait ordinairement pas le lien entre un mieux-être et une activité mentale réduite, entre ses émotions et son penser intempestif, ni entre ce qui nous arrive et ce que nous avons d’abord pensé.
De surcroît, le commun des mortels ne serait pas interpellé par ces premiers mots car le penser est vécu comme un fonctionnement naturel, telle la respiration par exemple, comme s’il était établi que l’on ne pouvait pas ne pas penser et qu’il n’y aurait aucun intérêt à s’arrêter sur la question. Or, avant d’évoquer la possibilité de ne pas penser ou de penser beaucoup moins, une première chose très importante peut être observée : en général, ce n’est pas seulement que l’on ne fait que penser, mais on est surtout et souvent complètement perdu dans ses pensées. Cette errance dans ses pensées peut être plus ou moins prononcée. Une fois ou l’autre, nous avons tous été surpris alors que nous étions perdus dans nos pensées ou nous avons surpris quelqu’un perdu dans les siennes.
Si cette errance dans ses pensées peut donc atteindre des degrés variables, on devrait pouvoir aisément imaginer la possibilité de ne pas s’y retrouver du tout. Des pensées demeurent, mais on ne s’y perd plus alors. Et ne pas être perdu dans ses pensées, c’est (bientôt) en être sciemment conscient. On peut dire que l’on voit ses pensées. On en est conscient, sciemment. À partir de là, une seconde chose intéressante sera observée : les pensées qui sont reconnues sciemment tendent à se faire de moins en moins nombreuses, à se bousculer moins. Et si c’est le cas, quand c’est le cas, la possibilité, sinon de ne plus penser du tout, de penser encore moins se révèle d’elle-même et nul besoin alors d’y croire. On en fait l’expérience directement.
« OK, on vit des moments de plus en plus nombreux où l’on ne se perd plus dans ses pensées, où l’on accorde beaucoup moins de crédit à ses pensées, voire où l’on cesse carrément de penser, mais la belle affaire ! Et alors, quel en est l’intérêt ? » On peut évoquer plusieurs intérêts. Ce que l’on pense n’est pas toujours joyeux, loin s’en faut, et la pensée est créatrice. Cesser de penser comme on pense, c’est souvent cesser de se compliquer la vie. Les pensées sont dictées par le conditionnement et cultiver les unes, c’est cultiver l’autre. Penser comme on pense, c’est être et rester identifié, faire de la projection et de l’introjection (prendre autrui pour soi-même et se prendre pour autrui).
Le penser intempestif, incessant, prive forcément de l’intuition, limite l’inspiration et la créativité. Penser, c’est avoir son attention dirigée, mobilisée, concentrée, et elle n’est donc pas disponible pour laisser être et accueillir quoi que ce soit d’original. Le penser compulsionnel a besoin du passé, de la mémoire, et c’est encore vrai quand il juge l’instant présent ou fait de l’anticipation. Lorsque le penser n’a plus le dessus, lorsque le dessus ne lui est plus réservé, ce n’est pas le vide, le néant, même s’il y aurait là encore de quoi cheminer, mais c’est « une autre histoire ». Quand cesse le penser, reste notamment le ressenti, l’accès direct au ressenti, la prise en compte possible du ressenti, qu’il s’agisse de ressentir l’environnement ou de la conscience des ressentis douloureux qui cherchent sans cesse à se faire connaître.
On pense à une chose et voici que l’on y pense encore, que l’on en remet une couche : pourquoi ? On dit une chose, la répète, parfois même en boucle : pourquoi ? Verbalisée ou non, la pensée inopportune existe, soit parce qu’elle dit indirectement un ressenti douloureux sans qu’il soit reconnu, soit à dessein inconscient d’éviter tout ressenti, quitte même, en cas de verbalisation, de couper toute communication pouvant faire place au ressenti. Une personne est sur le point d’exprimer une émotion, heureuse ou malheureuse, et une autre peut alors s’empresser de dire une banalité, quelque chose qui se veut drôle tout en étant mal à propos, voire de faire une critique qui surgit comme un cheveu sur la soupe.
Non seulement le ressenti est rarement reconnu, a rarement droit de cité, mais on s’emploie presque sciemment à l’éviter, à l’empêcher, à le couper, qu’il s’agisse de son propre ressenti ou de celui d’un autre. On se questionne parfois à propos de l’inconscient et du refoulement alors que l’on fait fi de ses ressentis immédiatement accessibles. Pourquoi rechercher des « informations » qui ne sont pas là en dédaignant celles qui s’offrent à soi et qui sont les plus précieuses ? Le plein accueil de son ressenti présent permet la remontée et la libération du douloureux enfoui plus profondément.
Prenons comme exemples deux pensées possibles : « Les gens font ou disent n’importe quoi », « Si ça se trouve, je ne vais de nouveau pas pouvoir… ». À partir de l’une et l’autre de ces deux pensées, une myriade d’autres vont généralement se bousculer et l’on ne devrait pas avoir trop de mal à l’imaginer. Or, si je pense que les gens disent et font n’importe quoi, si je le dis et le répète, il est certain que du ressenti est impliqué : de l’irritation, de la désolation, du regret, par exemple. Et, par ailleurs, je n’imagine certainement pas que je ne vais de nouveau pas pouvoir… (faire ou obtenir ce que je veux) sans être avec par exemple de la peur, de la frustration, de la lassitude…
Alors, au lieu de continuer de penser tout ce que je pense, ce qui n’est jamais que ressasser toujours les mêmes choses, ne serait-ce pas mieux que je dirige maintenant mon attention sur ces sentiments, ces émotions, sur le ressenti ? D’ailleurs, avant même que de savoir si ce serait mieux effectivement, pouvons-nous simplement reconnaître cette possibilité ? Je pense ceci ou cela, pouvant longtemps broder autour, continuer donc de penser, ou « m’arrêter » et me dire : « OK, je pense ça, mais qu’est-ce que ça me fait sentir ? Comment est-ce que je me sens dans l’instant même où je pense à cela ? Qu’est-ce que je ressens ? Même si cette possibilité ne nous interpelle pas, ne nous intéresse pas, pouvons-nous au moins admettre qu’elle est bien réelle, qu’elle existe ? Pouvons-nous reconnaître que nous n’en avons pas la moindre expérience ?
En effet, on peut continuer de penser comme on pense, comme on a toujours pensé, ou on peut – si on le souhaite – choisir d’accorder son attention à ce que l’on ressent dans le même temps où l’on pense. Assez vite, on découvre alors que l’attention dirigée sur un ressenti douloureux a tendance à le dissoudre, à laisser remonter d’autres vieux ressentis douloureux qui sont à leur tour reconnus de même, accueillis et dissipés.
En fait, le seul but du penser intempestif est la résistance au ressenti, à ses vieilles douleurs, mais également à ses élans véritables, ceux qui sont alignés sur son plein épanouissement. Ce sont là des informations utiles et précieuses que le penser compulsif ne permet pas de recueillir et il y en a bien d’autres. Pour beaucoup, la différence n’est pas claire entre penser et observer et entre ce qu’est « penser » et ce qu’est « sentir ». L’une des difficultés semble être le fait que penser implique du « faire » et la perception de son ressenti ou de ses réactions du « non-faire ». Penser est « actif » et percevoir est « passif ». Le penser, actif, cause un enchaînement de réactions et le percevoir aboutit à des actions justes…
Là où il devient judicieux, très judicieux, très utile et libérateur, de juste reconnaître son ressenti, de rester avec, sans rien en penser, plutôt que de penser encore précisément, plutôt que dire ou se dire mille choses, c’est quand on se rappelle n’importe quelle circonstance contrariante. Cette circonstance peut être un conflit relationnel, une condition de vie matérielle, un ennui de santé, n’importe quoi. Généralement, c’est fou tout ce que l’on en pense, en termes de considérations multiples aussi bien que d’impertinence ou, disons-le, d’absurdité.
Ne nous arrêtons pas ici sur ce dernier point, mais disons tout de même qu’il fait partie des choses que l’on découvre quand on s’invite à lâcher la tête pour juste être dans la reconnaissance neutre ou bienveillante de ce qui est. On finit par se rendre compte comme jamais de la folie du monde aussi bien que de ses propres incohérences.
Pour tenter d’évoquer la différence entre le penser compulsif et l’autre positionnement possible, voici les mots qui sont jusque-là apparus dans le texte comme pouvant « définir » ce positionnement : observer, voir, prendre en compte son ressenti, l’accueillir, accorder son attention à ce que l’on ressent, recueillir, sentir, percevoir, reconnaître ce qui est, rester avec, découvrir… En fait, d’une certaine manière, ces mots tentent de définir l’état de présence ou la présence dévoilée.
C’est un « état » d’accueil, de réceptivité, de non-faire. C’est l’être, c’est ce que nous sommes, là d’où tout est possible (incluant l’action). On peut dire encore que c’est être conscient d’être conscient de ce qui est. Pourquoi est-ce généralement difficile d’approcher cet espace intérieur que j’appelle aussi « l’espace de l’acceptation véritable » ?
Pour beaucoup, ça semble très difficile de l’envisager à partir d’une contrariété, à partir de tout ce qui nous fait réagir. On n’est même pas toujours conscient de s’y prêter, mais on tient par-dessus tout à réagir, à réagir encore, à réagir comme toujours, et dès lors, tout est foutu ! Puisqu’on veut réagir, puisque réagir est ce que l’on veut, on ne veut pas autre chose. On ne veut pas renoncer à la réaction et simplement regarder ce qui se passe en soi. On ne veut pas abandonner la fuite en avant pour s’arrêter à ce qui est là, en soi. Quitte à faire grincer quelques dents, j’ajoute même que l’on ne veut pas de solutions. On ne veut pas de solution, on veut réagir au problème. On ne veut pas de solutions, on veut des problèmes pour pouvoir… y réagir…
Pour ne pas parvenir à la solution d’un problème, il est largement suffisant de continuer d’y réagir. Le succès est garanti et toute notre existence en témoigne. On ne sait évidemment pas que l’on n’est jamais contrarié pour la raison à laquelle on croit (leçon 5 d’Un cours en miracles). Peu importe l’aspect abominable de toute circonstance, la façon dont on en est affecté provient de son seul conditionnement et ne concerne en rien cette circonstance. L’ego n’entendra pas ces mots ou, s’il les entend, il s’empressera de les contester, de les rejeter. Il se moque bien de s’entendre dire que, grâce à cette compréhension, beaucoup se sont libérés, se sont épanouis, se sont donnés de vivre ce à quoi ils aspiraient.
J’évoque ici la résistance à reconnaître ou à emprunter le chemin libérateur, ce qui ne suggère évidemment pas que ce chemin serait toujours immédiatement aisé et efficace. Nos conditionnements sont très puissants et dissimulent parfois des histoires très lourdes dont les ressentis douloureux profondément enfouis ne jaillissent pas forcément dès le début. Ce qui est à savoir, c’est que dans tous les cas, on se fait du bien à préférer la reconnaissance du ressenti associé aux histoires vécues plutôt que la seule mentalisation de ces dernières. En quelque sorte, le temps passé à regarder et voir véritablement plutôt que penser encore est toujours d’un effet immédiatement heureux.
Maintenant, on peut aussi laisser de côté le ressenti ou plus exactement le ressenti douloureux pour insister encore cependant sur la réalité des deux « positionnements » si différents qui s’offrent à nous : mentaliser, ne faire que penser ou être sciemment présent. Nous ne pouvons qu’être présents, même quand nous pensons inutilement, mais être sciemment présent est tout autre chose. Quand on est sciemment présent, rien ne nous échappe. On a une connaissance directe de ce qui se trouve dans l’instant : des images (autour de soi), des sons (de partout), des odeurs, des impressions tactiles (ce que l’on touche et non pas seulement avec ses mains), des sensations corporelles, des émotions, des sentiments, des impressions, des pensées vagabondes, mais encore des élans, des pressentiments, des intuitions, de l’inspiration (des idées nouvelles)…
Est-ce difficile d’imaginer que beaucoup de toutes ces choses nous échappent quand nous sommes pris dans les pensées, par les pensées ? En elles-mêmes, les pensées ne sont pas un problème, mais se les accaparer devient vite discutable. Moins on est pris mentalement, plus on est sciemment présent et plus on sent immédiatement ce qui est juste pour soi (au besoin). Être sciemment présent, c’est être en mesure de voir, d’entendre, de sentir de façon efficace (féconde, transformatrice). C’est avoir accès entre autres à son ressenti et, ce faisant, à la possibilité de libérer ou résorber le douloureux qui a toujours été dédaigné au bénéfice des considérations mentales vaines, répétitives et « agentes du malheur ».
Le ressenti douloureux qui sous-tend l’activité mentale compulsionnelle, réactionnelle, est principalement constitué de peur, de honte et/ou de culpabilité. Plus il est fui, ignoré, plus on le projette et il représente alors un « outil créateur » très efficace. Pour créer quoi que ce soit, en fait nos conditions de vie, nous avons à notre disposition deux outils pareillement efficaces : la peur, laquelle comprend aussi bien le vouloir que le non-vouloir, et la disposition vraie (sans attente) à vivre le meilleur. Et nous n’avons besoin de rien d’autre pour manifester ce que nous avons à vivre, qu’il s’agisse des épreuves – pour libérer le douloureux – ou des bonnes fortunes – pour célébrer l’appréciation de la vie déjà « vibrante ».
Par exemple, avez-vous déjà connu une personne particulièrement concernée par la honte ? (Peut-être vous-même). N’avez-vous pas alors remarqué avec quelle « facilité » elle s’attirait des situations idéales pour inlassablement revivre cette honte ? Je connais quelques personnes qui partent en ville avec la peur de ne pas trouver une place de parking et, évidemment, ils n’en trouvent pas. (J’en connais bien d’autres qui font d’autres expériences.) Du fait de se vivre irrationnellement comme coupable, on « se punit » en s’attirant diverses complications, mais le lien devient là plus difficile à repérer. Pourtant, si l’on y fait vraiment attention, on pourra découvrir que des accidents, des blessures ont été précédés par des « j’aurais pas dû, j’aurais dû, j’ai encore oublié de…, etc. », par de la culpabilité.
Si vous savez votre état réactionnel, si vous avez pu l’identifier, ne serait-ce qu’après manifestation, vous avez probablement déjà remarqué que, dans la réaction, le conflit ou le problème s’aggrave. En fait, c’est toujours l’état réactionnel, y compris dans ses formes les plus discrètes, qui est à l’œuvre pour la manifestation de l’adversité et des contrariétés en séries. S’il vous arrive de casser des objets ou de vous faire mal en cognant un mur quand vous êtes dans la réaction, vous voyez bien que vous surajoutez un problème à un problème, du douloureux au douloureux.
Ce sont là quelques exemples plutôt anodins, mais ils illustrent la réalité de notre responsabilité quant à nombre des conditions de vie que nous déplorons. On peut dire que « nous les créons » ou qu’ils sont les effets de notre conditionnement. Autre chose vous est certainement arrivé aussi : vous est soudainement venue l’idée d’un projet, d’une intention, d’une envie souriante. Juste la considérer vous était alors très agréable et peut-être vous êtes-vous vu poser un premier acte dans ce sens. Vous n’avez agi que dans le respect de l’idée même, mais sans attente particulière, sans préoccupation. Dans ce cas, la chose s’est réalisée facilement, si facilement que vous ne l’avez peut-être même pas relevée !
Dans l’état de présence dévoilée (ou avec la présence dévoilée), le respect de son ressenti libère peu à peu du conditionnement fâcheusement créateur et laisse jaillir les élans jusque-là étouffés et qui peuvent alors être suivis de plus en plus facilement. Or, l’essentiel n’est pas dans la manifestation de quoi que ce soit, incluant les réalisations les plus extraordinaires, mais « l’état » de présence dévoilée offre bientôt la paix et défait l’identification à tout ce que nous ne sommes pas et qui faisait notre mal de vivre. C’est la libération évoquée de notre vieux conditionnement.
Vous n’êtes pas principalement une personne pensante, vous êtes essentiellement la présence. Vous n’êtes pas une personne souffrante, vous êtes l’aptitude à sentir, à sentir en conscience, à sentir sciemment. Vous n’êtes en rien votre histoire ; elle appartient complètement au passé ; vous êtes ce qui peut en être conscient, sciemment. Vous êtes ce en quoi tout a lieu, tout se présente, tout va et vient, mais vous n’êtes rien de ce qui est advenu, ni même de ce qui advient. La paix qui est là et l’amour que vous pouvez sentir et rayonner sont le murmure de qui vous êtes et qui est au-delà de ce qui peut être décrit. Les deux même inconscients, votre amour est aussi réel que votre souffle ou votre amour l’est plus puisqu’il demeurera après votre dernier souffle.
Dire, par exemple, que vous n’êtes pas une personne souffrante, n’est pas mépriser la « souffrance » à laquelle vous pouvez être confronté, mais c’est commencez à la guérir si vous recevez le message. En fait, vous ressentez d’abord une vieille douleur qui pourrait être accueillie et résorbée, mais ce qui la mue en souffrance, c’est tout ce que vous en pensez, à commencer par le penser identificatoire : « JE suis celui (celle) qui souffre ; c’est MOI qui souffre ». Une douleur remontait, passait, douleur relativement pénible, et, comme si ça ne suffisait pas, on s’y est attaché.
Or, ça ne suffit pas encore et d’autres pensées jaillissent : « C’est injuste, je suis maudit, je n’ai pas de chance, c’est la fatalité, c’est de ma faute, ça va durer, ça va empirer, je ne pourrai pas le supporter… ». Ce qui n’était qu’une douleur passagère est devenu une souffrance prolongée. La souffrance est une douleur mentalisée. En fait, elle tombe bien puisque je suis très fortement attaché à une forme de réaction et pour réagir comme « j’aime » réagir, j’ai besoin de souffrir ! Eh oui !
Avant d’être des êtres qui pensent, nous sommes des êtres qui ressentent et c’est quand nous nous en remettons davantage à cette aptitude que nous nous libérons, que nous allons vers plus d’épanouissement. Sentir en conscience est forcément et tout bonnement « être présent », honorer ce qui est ici et maintenant. On peut penser à hier ou à demain, en vain, et l’on ne s’en prive pas, mais on ne peut pas sentir hier ni demain. Alors, simplement, sachons, reconnaissons, rappelons-nous ces deux modes de « fonctionnements » si différents, le penser prenant et le ressenti épanouissant.
Il ne s’agit pas de se forcer à renoncer au penser compulsif pour basculer dans le ressenti, dans l’observation, dans l’acceptation véritable, dans la conscience de l’instant présent (ces formulations sont relativement synonymes), mais la connaissance et la considération d’une autre réalité possible devient doucement un chemin que l’on emprunte de façon naturelle. Non seulement on n’a à se forcer à rien, mais on relâche aussi toute attente de résultats, tout jugement quant à ses progrès (éventuels) et l’on peut s’aider avec une question simple à se rappeler aussi souvent que possible : « OK, je pense à ceci ou à cela, mais ce faisant, qu’est-ce que je ressens ? ». On n’attend pas de réponse, juste « on sent », l’idée étant alors de ne rien penser à propos de ce qui est ressenti. Ce qui est ressenti est reconnu, c’est tout !
Ici est évoquée « l’acceptation véritable » sur laquelle nous nous arrêterons longuement prochainement. La non-acceptation (réactionnelle) engage bien sûr le mental, le penser, et sentir sans jugement ce qui est, le reconnaître, c’est « pratiquer » l’acceptation véritable. En fait, l’acceptation véritable est un état de conscience avant d’être une façon de gérer les choses. C’est une qualité essentielle de l’état de présence. Dans la présence, tout est accepté, y compris votre non-acceptation…
Acceptons de sentir, de sentir vraiment, de sentir plus. Acceptons d’être avec ces ressentis que nous n’avions justement pas acceptés jusque-là. Et si ça ne veut pas, si ça résiste, si ça n’accepte pas, acceptons cela ! Arrivé à ce stade, il est possible qu’une forme de paix ou que de la douceur se fasse sentir, alors acceptons-le ! Le meilleur n’est pas forcément le plus facile à accepter. Cela aussi, acceptons-le ! De l’espace intérieur d’acceptation, l’espace de la conscience, de la source, émergent aussi des idées nouvelles et des élans à suivre. Acceptons-les et, tôt ou tard, nous verrons se manifester ce qui nous tient à cœur, ce que nous avions peut-être même ignoré ou que nous n’avions pas encore accepté…
Une ancienne chronique sur le même thème :
Salut Robert,
très belle chronique.
j’aurais du commencer par lire la chronique d’octobre, avant celle de mars car j’ai ici des éléments de réponse. Mais je ne regrette pas mon commentaire il va dans la recherche d’un sens à la vie, plus que de vouloir se défaire de nos conditionnement.
tu dis que nous avons une fâcheuse tendance à être dans le réagir. Certes tu as grandement raison, mais je te dirais que cela vient fortement des enseignements reçus qui mentalise, raisonne et cherche une logique à tout.
il me semble que depuis les philosophes grec, l’homme cherche par la logique à faire du mystère de la vie un objet de connaissance pour l’étiqueter, trouver l’équation du bonheur et le pourquoi du malheur afin de tout mettre dans un dossier. Ne surtout pas oublier et grâce à mes encrages, mes mémoires je fais pouvoir réagir comme il faut … et ce pour tout.
Sans compter notre propre aptitude au travers d’une mauvaise vision de ce qui est, à créer par une mauvaise interprétation des scénarios, protégés par la peur et donc me faire réagir pour défendre ce à quoi je crois, m’identifie et suis attaché.
lorsqu’on ne réagit pas, que l’on observe simplement, il y a comme un grand vide.
il manque quelque chose, la situation semble trop simple. Je n’existe pas.
c’est pareil lorsque tu rencontre quelqu’un très vite la médisance est là, pour trouver un réconfort valorisant à travers la critique. on se rassure mutuellement d’être mieux que d’autre.
si je pars du principe que la solution est en moi et non à l’extérieure, prendre la responsabilité en conscience de mes propos et actes.
de quoi fais je donc bien pouvoir parler ?, quel sujet de discution à un quelconque intérêt ?.
Je n’ai rien a dire à qui que ce soit qui s’impose comme étant quelque chose de valable. C’est là que je mis perds un peu entre ce qui est à faire et ce qui n’a aucun intérêt dans le fond et la forme, c’est juste de la perte de temps et d’énergie.
A bientôt