La présence, ce que nous sommes (4/4)
L’essentiel n’est en rien ce que nous vivons, éprouvons, pensons, mais c’est la possibilité offerte à tous de s’éveiller et d’être en paix.
• L’apprenti – LA DISPOSITION À VOIR-. Nous avons donc à composer avec un état plus ou moins réactionnel, ce qui n’est qu’une façon de nommer le « sentiment de soi séparé » (sous sa forme manifestée). Retenons surtout qu’à la base, la peur, la honte et la culpabilité continuent d’infester et surtout de dicter tous nos positionnements.
C’est un conditionnement qui nous invalide, qui nous sépare de notre véritable nature, qui cause nos conditions de vie difficiles et qui entretient notre mal de vivre. Alors, où est la sortie, la solution, le facteur déterminant qui pourrait utilement être ajouté à la perception, à la compréhension et même à l’acceptation de ce conditionnement banalement humain ?
• La présence – Tout ce qui a été dit jusque-là est censé t’aider, te mettre sur le chemin de cette « sortie », mais nous allons tenter de l’éclairer davantage. Or, s’il y a déjà pure perception, compréhension et acceptation, c’est tout à fait remarquable. Le chemin est déjà emprunté. Peu d’êtres humains y ont accès. Alors, continue d’ouvrir les yeux et surtout ton cœur ! Pour décider de te laisser faire, le « temps de ce voyage », use de ta liberté, laquelle te permettra au besoin de préférer ensuite à ta guise une toute autre voie ! Au lieu d’en penser quoi que ce soit a priori, permets-toi de faire l’expérience des propositions de ces pages. Goûter à ces propositions est déjà en faire une expérience.
Il suffit d’être ouvert et intéressé, disposé à voir différemment les choses, sans attente. Toute attente est un obstacle, une limitation, de la peur dissimulée. Être dans l’attente, c’est en outre ne toujours pas être présent. Dans l’humble disposition à voir, ce qui a besoin d’être libéré se révèle et se dissipe alors. Sans attente, le souci du temps nécessaire à la libération disparaît et, du même coup, le temps se raccourcit.
LA COLÈRE INCONTOURNABLE-. Pour commencer et pour entrer dans le vif du sujet, parlons de colère. Quel est ton rapport particulier avec la colère ? En fait, soit tu es toujours en colère ou très facilement en colère, soit tu ne connais la colère qu’à travers une sorte de mécontentement plutôt discret ou de bougonnement à peine visible. Autrement dit, tu es un coléreux plutôt démonstratif ou plutôt renfermé. Et pour être un peu plus précis, vois (honnêtement) lequel de ces cas de figure pourrait te correspondre le plus – vois-le juste pour toi :
• J’éclate de colère à la « première occasion » (besoin d’en découdre) ;
• Mes colères ne sont que des coups de gueule passagers (seconde nature) ;
• Je cherche à entraîner les autres dans ma colère (pour renforcer ma justification) ;
• Je m’indigne à tout propos contre le monde (de façon systématique) ;
• Quand j’exprime de la colère, c’est avant tout de la haine (revécu d’une injustice terrible) ;
• Ma colère peut parfois friser l’hystérie (quand je ne parviens pas à mes fins) ;
• Je ne sens plus ma colère face aux personnes à qui je voudrais m’en prendre et qui sont en fait innocentes ;
• Je réserve mes seuls brefs accès de colère aux objets que je peux même casser (le trop-plein) ;
• En colère, je m’en prends parfois à des tiers non concernés (sans « jamais » le reconnaître) ;
• Je ne me sens jamais en colère, mais il me semble bien que je ne me la permets pas ;
• Je me mets rarement en colère, mais c’est alors tonitruant (bornes dépassées) ;
• Je n’exprime aucune colère, mais je suis de fort mauvaise humeur (ambiance générale et chronique) ;
• J’ai toujours une bonne raison pour ne pas me permettre d’exprimer de la colère (situations embarrassantes et/ou risquées) ;
• Je n’ai jamais de colère, j’éprouve juste de l’impatience (en permanence)…
LA VRAIE CAUSE DE LA COLÈRE-. Peu importe la façon ou la circonstance, reconnais quand, comment, combien, soit tu peux te mettre en colère, soit tu retiens en réalité ta colère, voire que tu n’y as même pas accès. Ne te raconte pas d’histoires, la colère te concerne d’une manière ou d’une autre. Admets qu’il y a de la colère en toi. Comprends ensuite que toutes les formes d’expression de la colère sont de la culpabilité projetée. Il en est ainsi dans tous les cas. Il est assez facile de reconnaître son sentiment de culpabilité, par exemple, quand la colère accompagne un refus qu’il convient d’opposer à une demande. Kenneth Wapnick (enseignant d’Un cours en miracles) a écrit : « Figeant à l’extérieur de soi-même, la colère est la façon la plus efficace de se défendre contre la culpabilité » La colère refoulée et/ou retenue voudrait également projeter de la culpabilité, mais c’est souvent de la honte rajoutée qui réprime cette colère. Dans ce cas, la cause initiale ou reproduite de la colère peut être aussi une forme d’hypocrisie subie dans son conditionnement (perversité), dissimulée sous une bonne intention affichée, ce qui empêche un accès immédiat à la colère ou à son expression. D’ailleurs, retiens qu’il est malsain de s’interdire la colère ou toute autre réaction sans s’intéresser à la honte ou à la culpabilité qui la sous-tend forcément, qui la cause. Qu’elle soit exprimée ou réprimée, la colère est la réponse émotionnelle au sentiment d’impuissance et résulte du non-exprimé accumulé. Quand on l’exprime, elle devient ou révèle une perte de contrôle, tout en prétendant bien sûr exercer ce contrôle. L’ego nous fait croire, explique Un cours en miracles, que plus l’on investit de la colère à l’extérieur de soi, plus l’on est en sécurité. Dans un premier temps, il te faut percevoir qu’il y a effectivement de la colère en toi, que tu l’exprimes ou la réprimes, sous quelque forme que ce soit, et qu’elle n’est rien d’autre que la honte et la culpabilité que tu ne peux pas assumer. Je te rappelle que cette honte et cette culpabilité sont toujours irrationnelles. Oh, tu peux fort bien t’attirer des gens qui se comportent mal avec toi, mais en reconnaissant que la colère que tu exprimes ou éprouves alors est la même que tu exprimes et éprouves d’une manière générale, tu ne pourras pas te duper longtemps : la colère ou toute autre réaction n’est rien d’autre que ta culpabilité projetée ! L’ABANDON DE LA PROJECTION-. À partir de là (deuxième temps), tu vas pouvoir doucement envisager d’abandonner ton ressentiment envers l’autre, envers la circonstance extérieure, envers l’objet. C’est un premier pardon ou une forme de pardon. Ce n’est pas forcément facile ou, un certain temps, c’est même très difficile, parce qu’il s’agit là de renoncer vraiment à quelque chose à quoi tu as tenu depuis longtemps. Peu importe l’implication extérieure (personnes, circonstances), tu ne fais rien d’autre que l’utiliser de façon compulsionnelle pour projeter ta honte et/ou ta culpabilité. C’est alors renoncer à un gros soulagement passager dont tu ignores l’aspect illusoire et surtout autodestructeur. Ce sera un peu plus facile quand tu reconnaîtras les cas où ta colère (ta réaction) ne repose que sur tes seules interprétations (cas très nombreux) et en admettant donc que l’autre n’est en rien concerné par ta projection. « Un peu plus facile », disais-je ! Alors que tu projetais ta culpabilité, que tu ne voulais donc pas la sentir, voici, par-dessus le marché, que tu te sens maintenant coupable d’accuser à tort ! C’est ainsi que l’ego pourrait préférer maintenir l’accusation pour s’épargner le surplus de culpabilité sans voir, ce faisant, que cela ne fera qu’en accumuler de plus en plus. « Plus on se sent coupable, plus on a besoin de le nier en attaquant autrui, mais plus on attaque, plus on se sent coupable » (Kenneth Wapnick). Quant aux circonstances où l’autre se comporte manifestement de façon perverse, déloyale ou injuste, plus rien ne s’oppose à soi pour la projection de sa propre culpabilité qu’il semble même inutile de considérer. « Si l’on tient un « bouc émissaire fautif », on ne va tout de même pas s’en priver, on ne va pas se gêner ! On va le charger et s’y mettre même à plusieurs… » Observons ici, dans notre monde délirant, qu’un « vrai coupable » ne paie pas pour ce qu’il a commis, mais selon la culpabilité d’autrui projetée sur lui à cette occasion. Au bout du compte, lui aussi est en grande partie accusé à tort… Pour reconnaître la folie et la cruauté du monde (à commencer par celles d’un proche), tu n’as pas besoin d’y réagir, d’y projeter ta honte ou ta culpabilité (ce qui est ta propre folie, la folie humaine). Je suis sûr qu’il t’est arrivé, bien des fois, de gérer des comportements illégitimes sans passer par la réaction. En plus de ce qui vient d’être dit, si tu ne crois pas au hasard, tu comprendras que tu t’es attiré cette personne au comportement déplorable et que tu ne peux pas, en conscience, défendre une légitimité à la maudire. Je te propose de méditer cette question : « Est-ce que je m’attire les complications que je déplore pour y projeter ma culpabilité, pour réagir et souffrir de plus belle ou pour reconnaître enfin le douloureux en moi et m’en libérer ainsi ? » LA COLÈRE OU LA RÉACTION REVENDIQUÉE, JUSTIFIÉE-. Si tu résistes à l’idée que tu t’attires ce que tu endures, perçois que ce sont toujours les mêmes histoires. Si tu ne le vois pas pour toi-même, pense à quelques-uns de tes proches et tu devrais pouvoir confirmer qu’ils traversent chacun un même genre d’épreuves. Parfois, c’est caricatural ; parfois, c’est plus subtil.
Maintenant, autre difficulté, tu risques fort de croire que renoncer à ta colère envers ce « coupable incontesté » est lui faire un cadeau injustifié, y croire ou rester positionné comme s’il en était ainsi. Tout pardon peut être considéré comme un cadeau, mais tout non-pardon est surtout un poison. Ce poison est d’abord pour celui qui ne pardonne pas. Comme le disait Honoré de Balzac, « plus on juge, moins on aime ». L’abandon de tout jugement, c’est l’amour, c’est le pardon.
Le fautif te servant à projeter ta culpabilité, voici que tu as superposé du ressentiment à cette culpabilité et le tout représente ce poison… en toi. Le ressentiment brise le cœur de celui qui l’éprouve. Est-ce possible que tu ne puisses pas voir cela, le comprendre ? Entre nous, tu as suffisamment de quoi faire avec ta culpabilité pour ne pas y surajouter du ressentiment, pour ne plus maintenir cette option humaine dévastatrice. L’évocation de ta colère et de ton attraction des conflits et épreuves n’est pas pour t’en blâmer. Ce serait blâmer en vain le fonctionnement humain ancestral commun. On ne retrouve son chemin qu’après avoir vu que l’on faisait fausse route.
Par exemple, tu ne vas pas tout de suite abandonner le ressentiment, mais tu cesseras de le revendiquer si tu perçois ce qui vient d’être expliqué. Là encore, c’est un point important, parce que certaines personnes semblent confondre la reconnaissance d’un conditionnement avec sa disparition. Ainsi, reconnaître qu’il y a en toi de la culpabilité ne signifie hélas pas t’en libérer sur-le-champ. De la même façon inutile et même limitative, certains associent à la considération de l’une de leurs tendances le « il ne faut pas que j’agisse ainsi ». Et du fait de ces confusions ou associations inconvenantes, on peut résister à voir ce qu’il est simplement bon de voir.
• A. – Je perçois, reçois, comprends bien tout ça ! Maintenant, alors que j’ai évidemment peu accès à mes sentiments profonds de honte et de culpabilité (j’en ai compris la raison), il m’arrive aussi de me trouver sans colère, sans ressentiment évident, sans réaction face à certaines épreuves pourtant persistantes. Qu’est-ce qui m’échappe encore ? Oui, je sais qu’à chaque fois qu’il y a malaise, que quelque chose ne tourne pas rond, c’est forcément que quelque chose m’échappe !
• P. – CE QUE L’ON DÉPLORE, ON LE CRÉE SIMULTANÉMENT-. Si tu devais être sans culpabilité ni ressentiment (il n’y a pas de ressentiment sans culpabilité), tu serais épanoui ! Ta question semble indiquer que ce n’est pas le cas en l’occurrence et ce que tu dis t’échapper a déjà été largement évoqué dans cet échange. Considère l’une de ces épreuves persistantes et rends-toi compte, très vraisemblablement, que tu la prends, la reprends très souvent, que tu t’en empares mentalement pour en penser tout ce que tu en penses. Même si le penser intempestif ne révèle pas d’emblée la réaction, il est en lui-même une réaction, dictée et maintenue par la seule culpabilité.
Prendre mentalement l’épreuve, un conflit, tout problème, y penser donc inutilement et avant même d’y réagir plus grossièrement et d’en souffrir, c’est le créer ou, si tu préfères, le recréer. D’abord en toi-même, dans le monde mental et émotionnel, tu le manifestes d’instant en instant lorsque tu y penses comme tu y penses. Tout ce que tu déplores, c’est ce que tu crées maintenant et peu importe que tu l’avais déjà créé hier. Tu n’auras sans doute aucun mal à imaginer que tu puisses être mal en créant du négatif.
Tu penses le monde comme tu l’as toujours pensé, le monde en général comme ton environnement plus proche. Tu projettes les mêmes choses, tu crains les mêmes choses, tu t’attends aux mêmes choses, tu « vois » les mêmes choses, et tu éprouves donc les mêmes choses. L’univers se colore de tes peintures. On peut dire que la culpabilité est le dessinateur (caché), le concepteur. Nous ne sommes pas au bout du chemin, mais la suite sera pour toi de peu d’intérêt sans avoir perçu ce qui précède. (Peut-être serait-ce bon que tu relises ce texte dès le début, avant même de poursuivre, et, plus tard, les trois chroniques précédentes).
• A. – En fait, nous n’avons qu’un problème, un problème de taille, fait de notre honte et de notre culpabilité. Tout le reste n’en est que les effets. Sommes-nous capables d’envisager cela, de le considérer, de l’assumer ? Si notre état réactionnel représente l’édifice du sentiment de soi séparé, la honte et la culpabilité en constituent les fondations. Et tout ça, c’est un rêve, davantage un cauchemar !
P. – NOTRE PROBLÈME, LA SÉPARATION-. Oui, et ce seul problème qui est nôtre peut encore être appelé « la séparation », ce qui fait dire à Michael Dawson : « Si vous pouviez reconnaître que votre seul problème réside dans la séparation, vous accepteriez la solution ». Si tu ne peux pas d’emblée percevoir combien le sentiment de culpabilité sépare, cause un retrait, tu saisiras mieux sans doute que la honte donne envie de se cacher (intention séparatrice). De plus, que vas-tu éprouver si l’on voit que tu te caches ? Plus de honte encore ! Ultimement, tu as honte et tu te sens coupable de te séparer…
Séparation, culpabilité, honte, voilà le problème humain ! C’est un problème terrible, effroyable, cause de toute la souffrance, et pourtant complètement illusoire. Un « événement » d’importance doit se produire désormais et nous allons devoir le laisser se produire. Cet événement est appelé « pardon », mais il n’est pas une disposition mentale, ni ne peut être l’effet d’une sorte de contrôle délibéré. Un abandon de sa honte et de sa culpabilité va avoir lieu sans « personne » pour le faire. Le sentiment de soi séparé ne peut pas envisager de pardon et ce que nous sommes en essence n’en a pas besoin.
Or, la honte et la culpabilité voilent la présence que nous sommes, maintenant ainsi l’illusion de la séparation. Nos corps sont séparés, mais nous ne sommes pas le corps et l’amour que nous sommes n’est séparé de rien, limité à rien. Des synchronicités et de multiples autres signes montrent qu’il n’y a pas de séparation au niveau de l’être, de l’essentiel. Peut-être as-tu déjà observé qu’à quelque besoin d’importance, une réponse inespérée, rapide et parfaitement ajustée advenait parfois. En fait, cela arrive sans cesse, mais nous ne le remarquons pas. Cela arrive et peut arriver, parce que nous ne sommes pas séparés.
Un cours en miracles attribue ces interventions heureuses au Saint-Esprit et d’autres parleront de l’Intelligence infinie, de la bonté divine, de Dieu. Ici, je vais l’appeler « l’Amour inconditionnel », mais il importe assez peu de le nommer. Il suffit de savoir que C’est. Et c’est à Cela, à l’Amour, que nous abandonnons notre honte et notre culpabilité. L’amour les dissipera si nous les lui confions. Il s’agit donc de s’en remettre… à l’Amour.
Tu as pu ou tu peux encore reconnaître ta colère, ton état réactionnel, découvrir que la réaction n’est rien d’autre que de la projection. Tu as pu ou tu peux encore soupçonner et même commencer à ressentir sciemment ta peur, ta honte et ta culpabilité. Ce n’est déjà pas si mal, mais tu ne peux guère aller plus loin. Tu peux utilement identifier un certain nombre de tes vieux schémas et positionnements, mais tu ne peux pas décider d’expurger ta honte et ta culpabilité en deux temps trois mouvements. C’est là où il te faut t’en remettre. Tu acceptes d’abord que les choses soient ce qu’elles sont et… tu t’en remets !
S’en remettre à quelqu’un, c’est se fier à lui, avoir confiance en lui. C’est un abandon total si l’on s’en remet véritablement.
Merci Robert pour ces articles sur la présence et le conditionnement…ça me parle beaucoup.
Marie-Madeleine