Qui suis-je ou qui ne suis-je pas ?
(Le présent texte est retiré d’un prochain livre à publier, Le regard qui transforme)
Pour introduire un autre point de vue qui se veut être de la nature du « regard qui transforme », je vous pose ce mois-ci une question – elle est fréquente dans les milieux psychospirituels : « qui êtes-vous ? » Et je vous propose de vous (nous) arrêter plus spécialement à une des réponses possibles (sans dédain pour toute autre).
Éventuellement, de façon idéale, heureuse, vous me répondez : « Je suis le Divin, je suis l’Être, je suis ! Je suis le témoin, l’observateur, celui qui voit… » Vous pourriez ajouter encore : « Je suis le rien, le vide, d’ici et maintenant et de toujours, le Néant d’où tout est possible, de tous les possibles ».
Belle réponse à laquelle j’adhère, mais on pourrait répondre aussi : « Je suis M., Mme, Melle X, un homme, une femme, un parent, un travailleur (profession nommée), un artiste, un malade… » La première réponse tente de dire notre véritable nature et la seconde indique le(s) rôle(s) que nous jouons. Ailleurs, j’évoque le piège que constitue l’identification inconsciente marquée à nos rôles (aboutissant à des limitations, des auto-privations), mais c’est une autre réponse encore que je vous invite à explorer maintenant.
S’agissant de votre nature profonde, je sais déjà qui vous êtes, nous sommes « le même », et connaître les rôles que vous jouez me parlerait insuffisamment de votre réalité (j’ai plusieurs amis informaticiens, par exemple, et, outre ce même job, ils n’ont franchement pas grand-chose en commun) : quel genre de personne êtes-vous ? Vous êtes bien quelqu’un, non ? Et si vous répondiez à la question avant de lire plus loin ? Moi, je suis plutôt quelqu’un de disponible, et vous ? Vous reconnaissez-vous comme sympa, patient, drôle… ?
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En fait, pour préciser ou orienter mieux encore le « qui êtes-vous ? », je dois dire : « Quelles personnes, quels personnages êtes-vous ? Voire, ultimement, quels personnages logez-vous, en vous ? Vous n’êtes aucun de ces personnages (sinon lequel serait-ce ?) qui aurait en lui un être de nature spirituelle, mais vous êtes cet être qui joue différents rôles et, en outre, qui laisse la place – généralement sans contrôle – à ces personnages dont nous allons parler.
En effet, si l’être vierge que nous sommes est capable d’endosser et endosse nécessairement de nombreux rôles (un même individu pouvant être à la fois un homme (ou une femme, un salarié, le trésorier d’une association sportive, un guitariste, un philatéliste…), il peut de même être un agneau le matin et un lion l’après-midi. Si je considère les moments où je suis tout affectueux et d’autres où j’enrage, ne manifesté-je pas là deux personnages très différents ? Et lequel choisirais-je, pour tenter de me définir, si je devais n’en retenir qu’un ?
Surimposés à notre véritable nature (mentionnée dans la première réponse, idéale, donnée ci-dessus) et accompagnant les différents rôles que nous assumons concrètement (qui sont donc manifestes, incontestables), il y a ces personnages multiples, changeants, souvent envahissants que nous pourrions bien être avisé de (re)connaître. Ne sommes-nous pas plus à l’aise ou efficaces quand nous connaissons, savons, voyons ceci ou cela, telle personne, de quoi il retourne (où nous mettons les pieds) ?
Je vous présente ci-dessous 5 personnages et je vous invite à vérifier lequel d’entre eux (au moins un) pourrait vous être familier. Si vous ne le trouvez pas, mais êtes intéressé à l’identifier, demandez l’avis de vos proches. Imaginez un peu que plusieurs vous donnent la même réponse ! – On voit souvent mieux pour les autres… Et si vous êtes capable d’admettre que vous logez parfois (ou souvent) en vous tel ou tel personnage, sans vous juger, sans honte ni culpabilité, vous avez « gagné le gros lot » !…
Commençons avec celui qui se laisse influencer par ce qu’il voit, ce dont il entend parler…, au point de vouloir aujourd’hui une chose qu’il ne connaissait pas hier et qu’il oubliera demain au profit d’une autre. On le reconnaît (par exemple) en la personne qui achète et revend compulsivement des choses. Je le nomme l’ENVIEUX.
Il y a celui qui ne cesse de penser, parfois depuis longtemps, fort longtemps, à la belle relation qu’il souhaite, soit avec la personne avec qui il « partage » sa vie, soit avec celle qu’il n’a toujours pas pu approcher. Son obsession pourrait encore se fixer de même manière sur une activité, une acquisition ou autre. Je l’appelle le DÉSIRANT.
Venons-en au MAUDIT. Il laisse croire à la personne en qui il loge qu’elle est la victime du monde entier (des autres, de Dieu), que personne ne veut l’aider, voire que tout le monde veut son malheur. C’est relié à la rage qu’elle peut éprouver et exprimer y compris à ceux qui l’aiment. Et ceux-ci finissent par se lasser !
Le REBELLE est celui qui tient absolument à faire savoir qu’il n’est pas d’accord. Et sa compulsion est si forte que lorsque autrui est d’accord avec lui, lui ne l’est toujours pas. Il rappelle « l’enfant capricieux ». À l’instar des autres personnages, il ne peut faire autrement que remplir pleinement sa fonction.
Et il y a celui qui, dans son coin, ressasse les choses, établissant des listes de preuves des comportements intolérables des uns et des autres. Il peut bien avoir raison, parfois, mais il est seul à le savoir et, imperturbablement, il enrichit ses listes ! C’est une sorte de redresseur de torts que j’appelle l’ACCUSATEUR.
Reconnaissez ce(s) personnage(s) en vous, en vous en amusant, et n’en faites pas un étiquetage définitif et limitant. Mes observations montrent que ces personnages en impliquent d’autres qu’il n’est pas moins important de (re)connaître.
Si c’est l’accusateur qui vous envahit, l’INTUITIF vous visite souvent également. Le rebelle fait place à l’ANIMATEUR HUMORISTE apprécié. Le maudit devient un HÔTE généreux. Le désirant révèle un AFFECTUEUX bienvenu et l’envieux un VIVEUR qui peut enseigner parfois ce que veut dire « exister ».
Envieux, désirant, maudit, rebelle et accusateur, ces personnages tous intraitables sont à 100 % et continuellement hostiles à la moindre solution et être simplement intéressé à ne plus en être le jouet représente une porte vers la transformation souhaitable. Quand vous voyez un de ces personnages à l’œuvre chez vous, en vous, par le fait même de le voir, il perd déjà de son emprise. C’est lui qui ne veut que désirer, envier, prétendre être maudit, se rebeller ou accuser, mais vous, vous voulez être bien, comblé, en paix. Vous ne le voulez pas, vous l’appréciez, vous l’êtes.
Jusqu’à présent, qu’avons-nous fait de ce personnage indésirable et si limitant ? Comment l’avons-nous traité ? Nous avons, aurions pu le nier ou au moins l’ignorer. Nous l’avons surtout laissé faire, lui avons cédé beaucoup de place, parfois toute la place. Nous avons pu encore nous battre contre lui, nous accusant du pire, donc en nous culpabilisant ou en éprouvant la honte. Enfin, nous avons surtout cru être lui ; nous nous sommes identifiés à lui inconsidérément…
Il est clair qu’aucun de ces positionnements n’a été une aide et qu’il pourrait être temps d’explorer autre chose : le voir simplement, le reconnaître, l’accueillir ! Cela deviendra ne plus le prendre au sérieux, ne plus dramatiser. Oui, cela fera une différence !
Il est probable, soit que nous ayons invité ce personnage impossible en réaction à nos blessures de l’enfance, sans que nous ne nous le rappelions, soit que ce personnage nous ait attiré ces mêmes blessures pour avoir de quoi réagir, de quoi exister. Cela n’est pas si important ; ce qui l’est, c’est que nous pouvons le voir aujourd’hui, le remercier et reprendre les rênes. L’épanouissement est à notre portée, sachons-le !
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