L’éléphant bleu
Avant de lire cette chronique jusqu’au bout, si vous aimez les « exercices » d’observation (de conscientisation), je vous propose de vous arrêter un instant, de vous accorder quelques minutes et de répondre par écrit à la question suivante :
Que se passe-t-il actuellement dans votre existence ? Qu’est-ce qui retient le plus votre attention ? Notez vos réponses par ordre d’importance, en mettant la plus importante en tête de liste, et tâchez d’en avoir au moins cinq (mais ne vous en faites pas si c’est moins). Ensuite, pour chaque réponse, notez un sentiment ou une émotion qui peut lui être associée. Il s’agit ici d’énumérer les thèmes de votre vie qui habitent vos pensées quand vous vous endormez le soir, vous réveillez le matin, quand vous cogitez ou bavardez avec des proches… (Donc, c’est là où vous interrompez votre lecture pour faire l’exercice !)
Comme c’est ici une question à se poser à soi-même, elle perd le caractère d’indiscrétion qu’elle pourrait revêtir autrement. Notez qu’elle peut amener trois grandes catégories de réponses :
1. Ce qui nous préoccupe (les problèmes et contrariétés en tous genres).
2. Ce que l’on fait, réalise (nos diverses activités).
3. Ce à quoi l’on aspire (nos buts).
En général, la liste demandée pourrait bien ne contenir que des problèmes, ce qui pourrait même être considéré comme allant de soi pour certains d’entre nous, et nous permettre de découvrir que nous manquons terriblement de buts, d’aspirations pures, c’est-à-dire non associées à un manque, une impatience ou une autre émotion douloureuse. Même ce qui a trait aux activités (2ème catégorie) appartient encore à la première catégorie (celles des problèmes) si l’attention consacrée est fixée sur le caractère routinier, la pénibilité, la frustration ou autres aspects négatifs.
Ici, l’idée n’est pas de porter un jugement sur la tendance éventuelle à être plus ou moins négatif, pessimiste, à maintenir son attention sur l’aspect « problème » des choses, et encore moins de nous inviter à nier les préoccupations auxquelles nous sommes confrontés. Simplement, nous pourrions être intéressés à savoir où nous dirigeons notre attention le plus souvent. Ce serait savoir aussi à quoi nous ne l’accordons pas ou trop peu alors que nous nous attendons (peut-être) à d’autres expériences que celles que nous vivons (subissons).
Dans un domaine ou dans un autre, nous avons certainement des problèmes, bien concrets, c’est entendu ! Y pensons-nous, probablement souvent, pour tenter de les résoudre, même maladroitement, ou pour juste en souffrir inconsidérément ? Mais n’y a-t-il pas aussi ces problèmes que nous imaginons, appréhendons, visualisons ? Ceux-là ne sont pas concrets, ils sont irréels, pour l’instant, sauf que notre pouvoir créateur n’est pas un vain mot. Avec un peu d’observation et de compréhension, nous pouvons découvrir que ce que nous avons réellement déploré, nous l’avons d’abord craint (= imaginé, visualisé, « créé »).
Souffrir, c’est mentaliser une douleur, craindre sa pérennité, son aggravation, le pire (je rappelle plus loin que la douleur peut être traitée différemment). Or, quand est-ce que nous utilisons notre aptitude « à imaginer, à visualiser » (qui a sans doute fait ses preuves) en faveur de ce à quoi l’on aspire en toute sérénité ? Et puisque nous ne l’utilisons pas à cette fin, il ne serait pas étonnant qu’on ait oublié nos besoins profonds et nos buts les plus élevés. En effet, pourquoi se les rappeler si ça n’est pas pour leur accorder une véritable et tranquille attention, pour simplement les apprécier ?
Il s’agit « simplement » de placer dans sa conscience ce que l’on veut au lieu d’y placer ce que l’on pourrait dire ne pas vouloir. Il s’agit donc de quelque chose que l’on sait très bien faire, que l’on fait ordinairement de façon inconsciente et à notre encontre et que l’on peut s’entraîner à faire pour permettre la réalisation de nos buts. Cette aptitude créatrice est à l’œuvre chez celui qui apprend son code de la route, soit avec un tiraillement en se voyant déjà rater son permis de conduire (incluant la possible visualisation du problème d’argent), soit déjà heureux en se voyant au volant de sa première voiture… Ce que nous plaçons dans notre conscience détermine ce que nous allons vivre, tôt ou tard.
Certaines personnes doutent de leur capacité à placer consciemment dans leur conscience ce qu’elles veulent. C’est pourtant simple : pensez à un éléphant bleu ! Vous l’avez ? Vous le voyez ? Où est-il ? Dans votre conscience. Qui l’a mis là ? Vous ! Qu’importe que ce soit fou, vraisemblable, souhaitable ou indésirable, on peut mettre dans sa conscience tout ce que l’on veut ! Et que n’y mettons pas si souvent, des choses bien plus « folles » qu’un éléphant bleu !…
Maintenant, comment vais-je me sentir si, à la place « d’éléphant bleu », je mets « je rate mon permis », « je tombe malade », « je manque d’argent »… ? Comment vais-je me sentir si je substitue à « éléphant bleu » « mes relations sont harmonieuses », « je vis la prospérité », « je réussis ce que j’entreprends »… ? Testez cela et vous aurez la réponse ! Mais ne faites pas dépendre ce que vous placez dans votre conscience des croyances limitatives que vous pouvez avoir. Reconnaissez au besoin ces dernières et revenez à ___ (éléphant bleu – à la détermination à mettre dans votre conscience ce à quoi vous aspirez).
J’émets l’hypothèse que nous continuons de vivre ce que nous déplorons, parce que c’est ce à quoi nous accordons le plus notre attention, ce que nous fixons, replaçons inlassablement dans notre conscience (ce que nous « éléphant-bleutons » le plus). Cela ne veut pas dire que nous ne sommes pas animés de bonnes intentions ; cela veut dire que nous méconnaissons que nous sommes des créateurs. Ne le regrettons pas, prenons-le en considération !
Maintenant, si vous avez particulièrement du mal à identifier ce qui est bon pour vous, ce qui pourrait contribuer à vos aspirations profondes, reportez-vous à la chronique précédente, jusqu’au point 3. Ce que vous pourriez avoir tant de mal à vous accorder (et l’attendant d’autrui), placez-le dans votre conscience. Voyez-vous être avec vous-même aussi juste, bienveillant et respectueux que vous l’attendez du monde.
Une autre idée que j’aime contempler et tester est qu’au niveau de notre ressenti, nous pouvons faire d’un problème prenant un but joyeux : « J’en ai marre d’avoir mal au dos » peut devenir « « Je suis léger, souple, plein de vitalité ». Qui donc pourrait m’empêcher de placer cela dans ma conscience ? Dès que je le fais (avec cela ou n’importe quoi d’autre), je souris, mon ambiance intérieure change sur-le-champ. Au nom de quoi se priver de ce seul premier résultat ?
Ce faisant, ne niez pas vos peurs, vos croyances, vos réactions ; ne niez rien ! Reconnaissez-les, au contraire, voyez-les comme telles en admettant, aujourd’hui, que vous n’en avez plus besoin. Et accordez-vous le temps nécessaire pour les lâcher ; ne soyez pas dur et impatient avec vous-même ! Là encore, faites-en un but et sentez-vous prêt à le voir se réaliser. Sentez-vous prêt à voir se réaliser n’importe lequel de vos buts, toute chose que vous placez délibérément dans votre conscience.
Voyez si vous pouvez faire un jeu de ce que je vous propose ci-dessus, si vous pouvez y jouer de temps en temps, ou souvent ! C’est une manière de subir de moins en moins nos « vieilles rengaines » et de nous passer la musique ou les films que l’on choisit. Certains sont en désaccord sur l’origine des choses, de nos histoires, de nos blessures non guéries, mais il me semble que tout le monde devrait pouvoir se retrouver pour considérer simplement que mettre son attention, soit sur « l’ombre », soit sur « la lumière » produit des effets différents et que le faire est possible au moins de temps à autre.
Et si je parle de « jeu », c’est notamment parce qu’il n’est pas question d’efforts. Forcer et maintenir son attention dans ce contexte, ce serait vain. Vous avez placé la chose dans votre conscience, vous avez souri ou vous vous êtes senti bien, vous pouvez maintenant passer à autre chose. C’est ainsi que le « germe » croîtra. Le jardinier qui sème des radis ne reste pas à côté en gratouillant la terre (ce faisant, il les empêcherait de pousser, mais il vaque à d’autres occupations. Faites autre chose !
Et si la situation du moment est vraiment trop prenante, trop douloureuse, que vous y soyez complètement scotché (oui, cela nous arrive bien des fois), voici autre chose encore à tester :
– Ou bien enveloppez mentalement la situation, quoi qu’elle soit, telle qu’elle est, ouvrez-lui les bras, reconnaissez-la comme jamais vous ne l’avez fait ;
– Ou bien, si vous ne pouvez le faire avec la situation, si vous ne pouvez l’accueillir comme indiqué précédemment, faites-le avec ce qu’elle vous fait ressentir, embrassez votre ressenti, votre douleur, n’importe quelle réaction ;
– Ou bien, si cela encore ne vous est pas possible, si vous ne pouvez accepter, ni la situation, ni ce qu’elle vous fait éprouver, soyez simplement conscient de cette impossibilité, reconnaissez-la vraiment, tendrement, enveloppez-la, aimez-la !
En quelque sorte, il est bon de s’inviter à aimer, d’une manière ou d’une autre, « une chose ou une autre », car c’est l’amour qui donne vie, qui fait croître, qui transforme. La résistance fige. Culpabilisons-nous ou regrettons un peu moins, espérons ou convoitons un peu moins, et aimons un peu plus !
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